Assemblée Nationale : jamais le Palais Bourbon n’aura été autant représentatif de la société civile française, la richesse est dans la différence
Un pays ingouvernable, c’était le leitmotiv des médias au soir de ce second tour des élections législatives. Deux jours plus tard, les Français se félicitent de cette diversité de représentation dans l’hémicycle. Nos pays voisins ne se sont pas trompés, les Français crient toujours avant d’avoir mal.
mardi 21 juin 2022, par Denis Lapalus
Si nos pays voisins ne sont pas alarmés du résultat des élections législatives, c’est parce que les craintes que le pays soit ingouvernable est une phobie franco-française, la peur de l’inconnu. Pour une fois, l’Assemblée Nationale permet la représentation de personnes de la société civile, un grand plus pour la Nation. Femme de ménage, chauffeur-livreur, ex-boxeur... L’élection de la nouvelle Assemblée nationale, dimanche, est marquée par l’arrivée de profils inhabituels sous les ors du Palais-Bourbon, plus populaires, même si cadres et professions libérales restent les plus représentés, publient les agences de presse. La liste de ces profils atypiques est reprise :
Katiana Levavasseur (RN, Eure), 51 ans, agent d’entretien dans une grande surface. Fille d’un ambulancier et d’une aide-soignante, titulaire d’un BEP vente, cette conseillère municipale d’opposition depuis 2020 au Neubourg (4.200 habitants) entend défendre "l’emploi des petites mains de France qui, comme moi, se lèvent de bonne heure le matin (… ) pour gagner 11,75 euros (bruts, ndlr) de l’heure". M. Macron "nous a quand même traités d’illettrés, Hollande nous avait traités de sans-dents. Donc y a un moment, on a bien compris qu’on serait jamais respectés."
Jorys Bovet (RN, Allier), 29 ans, chauffeur-livreur. Il aspire à lutter contre la pauvreté et la désindustrialisation. "Je travaille depuis que j’ai 16 ans. Je connais la vie de monsieur et madame tout le monde. Et je vois que depuis plusieurs années, le pouvoir d’achat se détériore", avait-il déclaré au quotidien La Montagne.
José Beaurain (RN, Aisne), 50 ans, accordeur de piano non-voyant et vice-champion de France de bodybuilding. Issu "de la classe ouvrière", cet ancien salarié d’un magasin de musique à Soissons, bénéficiaire d’une pension d’invalidité, dit avoir été séduit par "l’accueil et la bienveillance" du RN.
Sébastien Delogu (LFI, Marseille), 35 ans, chauffeur de taxi. Fils d’un chauffeur de taxi et d’une vendeuse de vêtements, il obtient le brevet en candidat libre et commence à travailler à 18 ans comme vendeur de prêt-à-porter et agent de sécurité. En 2016, il se bat contre "l’ubérisation" de l’activité de taxi.
Mathilde Hignet (LFI, Ille-et-Vilaine), 29 ans, ouvrière agricole dans la ferme bio de ses parents. Quand on lui a proposé d’être candidate, "j’ai pas réfléchi longtemps. J’avais pas envie de rester à grogner dans mon coin. Je me suis dit :pourquoi pas moi ?", explique-t-elle à l’AFP. Pendant la campagne, "j’ai eu de bons retours. Les gens me disent : tu nous ressembles, tu parles comme nous."
Rachel Kéké (LFI, Val-de-Marne), 47 ans, femme de chambre. Franco-ivoirienne de 47 ans et mère de 5 enfants, elle se définit comme une "guerrière" et entend porter la voix des travailleurs "invisibles" à l’Assemblée. Cette militante CGT s’est fait connaître lors des 22 mois de grève des femmes de chambre de l’hôtel Ibis Batignolles à Paris, entre 2019 et 2021, lorsqu’elle s’est mobilisée pour améliorer les conditions de travail des femmes de ménage face au "mépris" de la direction.
Ségolène Amiot (LFI, Loire-Atlantique), 36 ans, téléopératrice dans les assurances. Membre du CHSCT, elle estime qu’il s’agit d’une mission "compliquée quand les lois sont faites pour les employeurs". Militante depuis 2007 de l’association Aides et du centre LGBT de Nantes, elle a mené des interventions au sein d’établissements scolaires sur la prévention des infections sexuellement transmissibles.
Andy Kerbrat (LFI, Loire-Atlantique), 31 ans, téléconseiller sur une plateforme d’assistance automobile et militant LGBT. Il a été délégué syndical CGT pendant quatre ans, avant de s’investir en politique lors des municipales de 2020 à Nantes.
Christine Loir (RN, Eure), 45 ans, auxiliaire de vie. Fille d’un charcutier et d’une mère au foyer, mère de trois enfants, elle est adhérente au RN depuis deux ans. Elle vit à Verneuil-sur-Avre, à 40 km au sud d’Evreux.
Antoine Villedieu (RN, Haute-Saône), 33 ans, policier. Ancien boxeur professionnel, il est porte-parole de la FPIP, un syndicat de police proche de l’extrême droite. Il avait été élu conseiller municipal à Vesoul en 2020 sur une liste de droite avant de démissionner un mois et demi après en raison de ses sympathies envers le RN.
Stéphanie Galzy (RN, Hérault), 40 ans, intérimaire à la Poste de Béziers. Mère célibataire, fille d’un éboueur et d’une femme de ménage, elle se définit comme une "Française du peuple", payant plus de 300 euros de gazole par mois.
Serge Muller (RN, Dordogne), 46 ans, aide-soignant. Entré en politique presque par hasard, son père était grutier-docker à Toulon et sa mère vendeuse puis mère au foyer. Il est élu à Bergerac.