Grande Sécu / complémentaires santé : extension des remboursements de la Sécu, les mutuelles souffrent déjà avant d’avoir mal
Les complémentaires santé coûtent une véritable fortune aux Français. Les prix des mutuelles santé n’ont cessé de grimper ces dernières années, et pourtant, elles sont en déficit et doivent augmenter encore leurs tarifs. Le gouvernement réfléchit à mettre un bémol à ce cercle vicieux, en rapatriant une partie des remboursements à la Sécurité Sociale. Une affaire de milliards d’euros.
lundi 15 novembre 2021, par Denis Lapalus
Le pouvoir d’achat... La clé des élections
Comme avant chaque élection présidentielle, le gouvernement en place s’attèle à défendre les Français face au sacrosaint pouvoir d’achat. Point sensible, les dépenses de frais de santé, et notamment, celles des mutuelles santé. Si les salariés sont favorisés, une partie des cotisations des mutuelles santé étant prise alors en charge par l’employeur, pour les indépendants ainsi que les retraités, les coûts des mutuelles santé sont exorbitants. Certains Français pensant même à cesser de cotiser auprès de mutuelles, afin de se constituer leur propre épargne assurance santé.
Coût exorbitant des mutuelles santé, près de 3.000€ par an, pour un retraité ?
Les seniors, et plus particulièrement les retraités devraient payer en moyenne 2.883 euros de primes d’assurances santé en 2022 (au lieu de 2.871 euros en 2021), pour un couple, soit +0.4% de hausse. Les hausses sont toujours trop élevées, mais ce qui est le plus dommageable reste ce montant astronomique de 2.883 euros. Il doit exister moins cher, c’est évident ! D’autant plus que pour un couple, nombre de mutuelles santé proposent des réductions significatives, de l’ordre de 10% pour la seconde personne.
Les frais de gestion des mutuelles en cause
Les mutuelles santé n’auraient-elles pas trop jouer avec le feu ? Le gouvernement a demandé au Haut Conseil pour l’avenir de l’assurance-maladie (HCAAM) de plancher sur un projet de Grande Sécu afin d’étendre le remboursement de la sécurité sociale. Ce projet ne sera publié que le 18 novembre, mais visiblement, le dossier est assez polémique pour que la presse ait été informée avant même sa publication (sic). Le constat est simple : selon un rapport de la cour des comptes, depuis 2009, ces coûts de gestion ont baissé au sein du régime de sécurité sociale (-4,8%) mais ont explosé parmi les organismes complémentaires (+38,7% pour les mutuelles, +49,9% pour les sociétés d’assurances et +67,4% pour les institutions de prévoyance).
Les mutuelles santé en déficit !
Argument qu’il ne faudrait pas trop rappeler. Et pourtant, les mutuelles n’hésitent pas à rappeler leurs 35 milliards d’euros de déficit cette année, et leur obligation de rééquilibrer leurs comptes. Si ce système ne convient pas, une opportunité donc pour le changer ! Pour cela, certaines envisagent de faire augmenter leurs tarifs en 2022, comme c’est le cas de la Mutuelle générale, qui prévoit des évolutions de cotisation entre 0 et +2,5%. "Nous avons eu des dépenses beaucoup plus importantes que prévues sur le premier semestre 2021. Nous sommes à +9% de la consommation de santé, et nous avons tendance à croire que ça va se poursuivre. Donc nous sommes contraints d’équilibrer avec des ajustements techniques, calculés au plus juste", justifie Eric Chenut. Le bras de fer entre les mutuelles et le gouvernement, lui, s’annonce âpre.
Pour 22 milliards d’euros de plus par an...
Depuis la crise sanitaire, le nombre de milliards d’euros pour un projet ne fait plus peur à personne. Si la sécurité sociale effectuait la totalité des remboursements de frais médicaux, le surcoût serait de 22 milliards d’euros par an (estimation publiée par Les Echos). Une paille comparée aux 300 milliards engloutis en moins de 20 mois. Le HCAAM prédirait que le chiffre d’affaires des complémentaires santé va ainsi baisser de 70%, soit une perte de 27 milliards d’euros, dont 19,7 milliards dus à cette étatisation des remboursements.
Affaire donc à suivre, avec la publication officielle du projet. Les mutuelles ont d’ores et déjà rappelé que ce secteur employait 100.000 personnes. Un argument qui devrait évidemment jouer largement et il est fort probable que ce projet fasse couler beaucoup plus d’encre dans les journaux que d’économies dans les tirelires des Français.