Hausse des prix alimentaires : 80% des Français se serrent déjà la ceinture et vont continuer de réduire leurs achats

Les habitudes d’achat des Français ont changé avec l’envolée des prix. La consommation de produits alimentaires évolue, les premiers constats sont marqués.

vendredi 30 septembre 2022, par Denis Lapalus

Les études sur le comportement des Français face à cette vague inflationniste se multiplie. Pas moins de 80% des Français ont d’ores et déjà changé leurs habitudes d’achat. Deux études attestent de ces changements marqués.

Inflation : 80% des Français réduisent leurs dépenses alimentaires

Selon Nielsen, les Français ont d’ordres et déjà changé de comportement. Ils n’achètent plus les mêmes produits, ils ne fréquentent plus les mêmes magasins et réduisent leurs dépenses. Dans une autre étude réalisée par Younited / OpinionWay [1], confirmation que les Français ont déjà changé dans leur quotidien pour faire face à l’inflation. Ainsi, 90% des Français se disent impactés par la hausse des prix et 86% estiment que cette inflation sera durable, en particulier pour leurs dépenses contraintes. Leur crainte se focalise en priorité sur la hausse des prix des denrées alimentaires (89%), l’augmentation des prix de l’énergie pour la maison (88%) et les déplacements (83%) et une potentielle explosion du coût des assurances (80%). Dans ce contexte, 71% des Français avouent aborder cette rentrée dans un état d’esprit négatif.

Modification des habitudes d’achats

Face à la hausse des prix, deux tiers des Français (64%) ont déjà modifié leurs habitudes d’achat, qu’il s’agisse de réduire les factures de courses alimentaires (46%) ou celles de l’énergie (40%). Les 24-35 ans sont ceux qui ont le plus adapté leurs dépenses, notamment leurs courses alimentaires (69% vs 58% en moyenne) et 44% d’entre eux ont réduit, reporté ou renoncé aux dépenses liées à l’assurance (vs 29% en moyenne). Les dépenses contraintes sont en ligne de mire : 46% des Français ont rogné sur leurs courses alimentaires et 40% ont dû faire des économies sur leur facture d’énergie. Pourtant, bien qu’ils se serrent la ceinture, les Français ne sont pas prêts à renoncer à tout : 68% n’ont pas amputé leur budget tabac et alcool (52%). Une part minoritaire mais significative de Français envisage d’avoir recours à des services financiers : 10% des 18-24 ans pourraient ainsi avoir recours à un crédit à la consommation pour assumer leurs dépenses contraintes, 13% pour maintenir leur train de vie et 18% pour faire face à des dépenses imprévues. Quant aux 25-34 ans, 29% se disent à la recherche de solutions de paiements flexibles. Une crise qui souligne l’impérieuse nécessité de suivre son budget : alors que 42% des Français se voient contraints de suivre plus attentivement leurs dépenses… 32% confessent n’avoir aucune méthode pour les gérer.

4 millions de foyers fragilisés

Pour le directeur général de Nielsen, Xavier Segalié, « quatre foyers sur cinq vont désormais faire très attention à leurs dépenses alimentaires ». Le cabinet d’analyse a classé les Français en quatre catégories de ce point de vue. Les « foyers contraints » dont les difficultés sont antérieures à la crise actuelle . Ils sont 4 millions sur un total de 28 millions. Les « foyers fragilisés » parce que leurs revenus ont baissé ou vont baisser sont 12 millions, soit 7 millions de plus qu’en décembre 2021. Ces personnes « vont faire des arbitrages forts », estime Xavier Ségalié. A cette catégorie, s’en ajoutent deux autres. Les « prudents » (9 millions), qui « mettent la pédale douce sur leurs achats » et les « préservés » (4 millions) qui « n’ont rien changé à leurs habitudes ».

Chiffre d’affaires des rayons alimentaires

Pour l’instant le chiffre d’affaires de la distribution alimentaire n’a pas baissé (+1,6 %), mais c’est uniquement parce que les prix en rayon ont augmenté (+3,1 %). « Le phénomène est nouveau », souligne le directeur général de Nielsen. « Dans toutes les années précédentes, le moteur de la croissance était l’effet mix. En 2022, le moteur est à plat, car 4 foyers sur 5 arbitrent ». Résultat, les volumes vendus sont à la baisse (-1,7 %) sans que l’on puisse encore parler de « déconsommation générale », car les quantités restent encore supérieures à 2019. Mais si tel est le cas c’est aussi en raison de l’énorme afflux de touristes cet été et de leur très grande consommation, ce qui a limité la casse.

La France va manquer de viande bovine

« Les foyers fragilisés, à faibles revenus, sont à eux seuls responsables des trois quarts des baisses de volumes », indique encore Xavier Segalié. Fait marquant, ce sont les foyers avec enfants qui réduisent le plus leurs achats (-5,1 %) en grandes surfaces cette année. Ce sont a aussi les familles qui diminuent le plus leur consommation de produits frais. Cela se voit surtout au rayon boucherie et à la poissonnerie avec des baisses respectives de 14,5 % et 12,5 %. Mais c’est également vrai au rayon fromages (-9 %), fruits et légumes (-8,8 %) . La charcuterie est moins touchée avec, malgré tout, un recul des ventes de 5 %.

Premiers prix, promos…

Les foyers français ont également changé d’attitude par rapport aux marques. Leurs choix se portent plus volontiers vers les marques de distributeur, alors qu’elles étaient « en décroissance depuis dix ans ». Ils recherchent les premiers prix et les promotions. « Jamais depuis longtemps on n’avait vu autant de chiffre d’affaires (21,2 %) sous promotion. C’est un effet de l’inflation », précise Xavier Segalié. L’importance des promotions vaut un manque à gagner de 3 milliards d’euros à l’industrie agroalimentaire.

Les circuits de distribution eux aussi changent de ce fait. Les hyper et supermarchés perdent des parts de marché au profit des commerces de proximité et de la vente en ligne, tous deux stimulés par le télétravail. Un foyer sur cinq pratique le télétravail au moins une partie de la semaine. A noter, les touristes fréquentent plus volontiers les commerces de proximité.

Solderies

Les solderies, type Gifi et Action attirent de plus en plus , y compris pour l’alimentation. Une redistribution des cartes est aussi à prévoir entre les enseignes en raison de la grande migration des Français vers l’Ouest du pays. Toutes ne sont pas aussi bien représentées dans cette partie du pays. « Les entreprises vont devoir en tenir compte », dit Xavier Segalié.

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