France : explosion du chômage, de la dette, baisse des revenus, pas de retour à la normal estimé avant 2022 pour la Banque de France
La Banque de France a publié ce jour ses prévisions pour la France pour les années à venir. Et ce n’est pas brillant. Explosion du chômage, endettement de 120% du PIB, recul des revenus... Aucun retour à la normal n’est envisagé avant 2022.
mardi 9 juin 2020, par Denis Lapalus
Les prévisions sinistres de la Banque de France
Alors que les marchés financiers ne cessent de grimper, le NASDAQ revenant même sur ses records de 2019, les USA étant pourtant officiellement en récession, les prévisions de la Banque de France ont un effet de douche froide. Le retour à la normale de l’économie française ne serait pas à escompter avant 2022.
Crise économique, davantage liée au confinement qu’à la pandémie en elle-même
Comme l’ensemble du monde, l’économie française a subi un choc d’une ampleur inédite au premier semestre 2020. En France, un confinement strict a été mis en place à partir de mi-mars. La Banque de France estime la réduction instantanée de l’activité à environ 32 % pendant la quinzaine de confinement de mars puis à environ 27 % en avril. Selon la deuxième estimation des comptes trimestriels par l’Insee publiée fin mai, le PIB a reculé de 5,3 % au premier trimestre 2020.
Chute du PIB
La baisse du PIB va mécaniquement s’amplifier au deuxième trimestre. Celui-ci cumule en effet six semaines de confinement jusqu’au 11 mai puis une sortie de confinement très progressive. La perte d’activité se creuse par rapport à celle enregistrée en moyenne au cours du premier trimestre avec seulement deux semaines de confinement. Dans notre projection, le PIB reculerait ainsi d’un peu plus de 15 % au deuxième trimestre 2020 par rapport au premier trimestre.
L’information conjoncturelle disponible depuis, en particulier les enquêtes Banque de France publiées ce jour, la confirmerait avec une perte d’activité à - 17 % fin mai et revenant autour de - 12 % fin juin. Par ailleurs, cette projection est construite sur la base des comptes trimestriels publiés par l’Insee fin avril et ne prend pas en compte les résultats détaillés du premier trimestre (ainsi que les comptes annuels pour 2019) publiés le 29 mai qui ont révisé à la hausse la croissance du PIB de - 5,8 % à - 5,3 %.
Chute du PIB de -10.30% en 2020
Sous l’hypothèse que les perturbations seraient moindres mais subsisteraient sur le second semestre, le recul du PIB sur l’ensemble de l’année 2020 serait de plus de 10% (-10.30%). À la suite d’un redressement graduel de l’activité, le PIB en volume retrouverait en 2022 son niveau de fin 2019.
Chômage : supérieur à 10% en 2020, pic en 2021
Avec le choc économique du début d’année 2020, les entreprises doivent faire face à une dégradation brutale de leur activité et de leurs comptes. Leur taux de marge et leur taux d’épargne subiraient en 2020 le plus fort recul enregistré depuis plus de quarante ans. Cette situation devrait provoquer une réduction importante de l’emploi.
Depuis mi-mars, les entreprises ont largement fait appel au dispositif d’activité partielle, ce qui a permis de réduire très significativement leurs charges. Malgré cela, l’ajustement du marché du travail est déjà amorcé : selon les premières estimations publiées par l’Insee, l’emploi salarié marchand a reculé de 2,3 % fin mars par rapport à fin décembre 2019 soit une réduction de 453 800 postes, dont plus de 290 000 dans l’intérim. Au quatrième trimestre 2020, le niveau de l’emploi serait inférieur de presque 1 million au niveau atteint fin 2019.
Baisse des revenus des Français
Les pertes de revenus moyennes des ménages sont limitées en 2020 au regard du choc (-0.50%), mais la progression du revenu disponible brut des ménages serait aussi contrainte ensuite. Le pouvoir d’achat du revenu des ménages se réduirait de 0,5 % en 2020 (–0,7 % par habitant). Ces chiffres en moyenne recouvrent bien sûr des situations très différentes selon les catégories de ménages, d’autant que l’ajustement du marché du travail devrait se faire initialement de façon plus prononcée sur les formes les plus précaires de contrats.
Ce recul du pouvoir d’achat du revenu des ménages en 2020 est limité, et très inférieur à la baisse du PIB sur l’année. D’une part, les transferts publics, par le jeu des stabilisateurs automatiques et des mesures mises en place par le Gouvernement, limitent les pertes de revenu des ménages. D’autre part, la relative résistance de l’emploi au regard du choc d’activité, décrite précédemment, amortit le choc de revenu pour les ménages en 2020.
La relative protection du revenu des ménages face à la crise s’amortirait toutefois avec le temps, à mesure que le marché du travail s’ajusterait. La progression du pouvoir d’achat serait ainsi de 0,9 % en 2021 puis de 2,1 % en 2022, des chiffres significatifs, et même forts en 2022, mais inférieurs au rebond de l’activité sur ces années.
(source : Prévisions économiques de la Banque de France / Juin 2020)