Étrange, cette notion de salaire décent proposé par Michelin. Le salaire décent pour les Français est bien plus élevé que celui calculé par le manufacturier de pneumatique.
jeudi 18 avril 2024, par Denis Lapalus
Après la validation de la rémunération de plus de 36 millions par an de Carlos Tavares (Stellantis), les questions de niveau de salaire ne cessent de créer des polémiques. La publication d’une référence de salaire décent par le groupe Michelin en créé une autre. Que vient faire la décence dans un niveau de salaire ? Ne serait-ce pas plutôt un niveau de salaire pour vivre dignement ?
Le SMIC n’est pas un salaire permettant de vivre dignement
Michelin annonce la mise en place d’un salaire « décent » pour tous ses salariés. En fonction du lieu de vie, ce salaire calculé évolue, ainsi à Paris il s’établit à 39.638 euros par an et à 25.356 euros à Clermont Ferrand alors que le smic annuel atteint 21.203 euros. Mais cela n’a rien de décent. Cette notion fait appel au sens moral, alors que l’on évoque la notion de pouvoir d’achat. Pouvoir vivre dignement.
| Lieux de vie | Salaire "décent" brut annuel |
|---|---|
| Paris | 39.638 € |
| Clermont Ferrand | 25.356 € |
| Pékin | 69.312 yuans |
| Greenville (USA) | 42.235 dollars |
Et pour les salariés ?
Du côté des salariés, la référence absolue du salaire décent n’existe pas. En effet, toutes les études montrent que le salaire décent pour un salarié serait de gagner près de 30% de plus que son salaire actuel, et ce, quelque soit son niveau de salaire actuel ! Ainsi, toute personne souhaite augmenter son niveau de vie, pour se libérer, ne serait-ce qu’un temps des contraintes financières qu’il rencontre.
Salaire décent
Michelin a ainsi publié ce jour, pour tous les continents un « salaire décent », pour l’ensemble des employés. Ce montant qui varie selon chaque pays et même chaque région n’a rien à voir avec le salaire minimum. À Pékin, Michelin propose 69.312 yuans à ses employés soit deux fois et demie plus que le salaire moyen local. Aux États-Unis à Greenville, la paie d’un ouvrier du fabricant de pneus (42.235 dollars) est presque trois fois supérieure au montant minimum (14.790 dollars).
Vivre au lieu de survivre
Plus récemment, la firme a décidé d’aller plus loin en mettant en place une « protection sociale universelle » pour ses salariés partout dans le monde. Elle couvre l’accès aux soins, le congé maternité/ adoption de 14 semaines et le versement d’un capital d’au moins un an de salaire à la famille lors du décès d’un salarié et le versement d’une rente d’éducation pour les enfants jusqu’à la fin des études supérieures. « Lors de l’épidémie de Covid, nous avons eu 50 décès au sein du groupe. C’est à ce moment-là que nous avons pensé à la création du programme Michelin One Care », explique Florent Ménégaux.
Salaire pour vivre dignement
Une réinvention de la politique sociale des origines ? "C’est fidèle à nos valeurs. On ne peut pas demander à nos salariés de s’engager dans un projet collectif s’ils sont en mode de survie. Ils ont besoin d’une rémunération de base pour pouvoir se projeter », justifie le dirigeant. Michelin cherche aussi à fidéliser ses employés dont le taux de turnover avait dangereusement grimpé ces dernières années. « Nous avions par le passé un taux d’attrition de 7% à 8%. Celui-ci a grimpé à 12 et 13% en 2021 et en 2022, rappelle Jean-Claude Pats, le directeur du personnel du groupe Michelin. Il a tendance à refluer mais il reste encore très important pour le groupe ».