Sécuriser Internet (filtre anti-arnaques, bannissement, etc.) : 6 mesures contournées avant même leur mise en place

Parce que contourner les lois est facile sur Internet, les mesures proposées pour sécuriser Internet, font sourire. Le filtre anti-arnaque étant pour le moins hilarant, il fallait y penser !

mercredi 4 octobre 2023, par Denis Lapalus

Sécuriser l’usage d’Internet : un vaste chantier

Les parlementaires pensent donc qu’il suffit donc d’ajouter quelques lois et mesures pour sécuriser Internet. Au lieu d’éduquer les utilisateurs, à détecter d’eux-mêmes les arnaques, à se défendre contre les harcèlements, etc., la sécurisation de l’usage d’Internet passera par quelques mesures, dont les impacts seront évidemment très limités, car contournés. Internet est le terrreau fertile poir les arnaques, les harcèlements, les vols de données... Le principal acteur pour les internautes français, Google, qui n’est pas réellement un moteur de recherche, mais une plateforme publicitaire, n’est toujours pas tenu de vérifier que les publicités diffusées ne soient pas des arnaques. Un comble.

Filtres anti-arnaques

Alors que les plateformes publicitaires, notamment sur les réseaux sociaux, ne détectent même pas les arnaques proposées au plus grand nombre d’utilisateurs, le ministre délégué au Numérique, Jean-Noël Barrot, souhaite donc mettre en œuvre la promesse de campagne d’Emmanuel Macron d’un filtre anti-arnaques gratuit adressant un message d’avertissement à toute personne qui s’apprête à se diriger vers un site identifié comme malveillant. Bon courage ! Le risque ? Tous les sites d’arnaques se cacheront davantage afin de ne pas faire afficher le message, et les internautes les plus crédules tomberont dans le panneau plus facilement, car aucun message d’alerte n’aura été diffusé. La liste des sites noirs de l’AMF montre bien que cela n’est pas efficace. La liste des sites signalés ne fait que se compléter, et le montant des arnaques ne fait qu’augmenter. L’éducation est la clé !

Bannissement des cyberharceleurs

Le règlement européen sur les services numériques (DSA), transcrit dans le projet de loi, comporte déjà des mesures visant à endiguer le cyberharcèlement sur les grandes plateformes numériques ( 20 % des 10-18 ans en ont déjà été victimes ), en contraignant celles-ci à retirer les comptes qui leur sont signalés. Mais le gouvernement souhaite aller plus loin et accompagner cette mesure d’une peine de bannissement. Concrètement, le juge pourra demander à un réseau social d’empêcher pendant une période de six mois - un an en cas de récidive - la réinscription d’une personne déjà condamnée pour cyberharcèlement.

Blocage administratif des sites porno

Le gouvernement va confier à l’Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom) le pouvoir d’ordonner, sans le concours d’un juge, le blocage par les opérateurs télécoms et le déréférencement des sites pornographiques qui n’empêchent pas les mineurs d’accéder à leur contenu. Des agents de l’Arcom pourront également être assermentés pour constater des infractions.

Les algorithmes d’Instagram facilitent la vente de pédopornographie : Les sites concernés auront par ailleurs 24 heures pour supprimer un contenu pédopornographique signalé. En cas d’échec, ils s’exposeront à 250.000 euros d’amendes et un an d’emprisonnement pour leur représentant légal. L’an dernier, 74.000 demandes de ce type ont été faites en France.

Blocage des médias de propagande

Le texte donne aussi à l’Arcom le pouvoir de faire cesser la diffusion sur internet de médias frappés d’interdiction dans l’Union européenne. La mesure vise particulièrement les sites de streaming non européens comme Odysee ou Rumble, qui avaient diffusé les chaînes pro-russes Russia Today et Sputnik malgré leur interdiction dans l’UE dans le cadre des sanctions prises après l’invasion de l’Ukraine. A la demande du ministre, Odysee avait stoppé la diffusion des chaînes et Rumble avait fermé son service aux internautes français. TikTok : principal site de propagande : Contre les manipulations toujours, deux amendements ont été déposés par des sénateurs visant à lutter contre les « deepfakes », ces images conçues par intelligence artificielle visant à truquer de façon très réaliste une photo ou une vidéo d’une personnalité. Le premier impose de mentionner que le contenu est truqué et le second interdit la production de deepfake pornographique sans consentement.

Interopérabilité du cloud

Mesure plus économique et inspirée des travaux de parlementaires, le gouvernement souhaite permettre aux entreprises de « changer beaucoup plus facilement » de fournisseur d’infrastructure et de services informatiques, c’est-à-dire de services cloud. Le secteur est dominé par les acteurs américains Amazon Web Services, Microsoft Azure et Google Cloud. Le texte prévoit notamment de permettre une « portabilité » des données entre les services de ces différentes entreprises et limite l’utilisation des « crédits cloud », des bons d’achat gratuits aujourd’hui utilisés par les acteurs pour fidéliser leur clientèle.

Réglementation des Jonum

Le Sénat a ajouté, lors de l’examen du texte, un volet législatif concernant la réglementation des jeux à objets numériques monétisables (Jonum) , supprimant l’habilitation à légiférer par ordonnance prévue par le gouvernement. Le texte propose une première définition en droit de leurs spécificités, entre jeux d’argent et de hasard d’un côté et jeux vidéo de l’autre. Le Sénat a autorisé à titre expérimental pour une durée de trois ans la création des Jonum, tout en l’encadrant pour s’assurer de la protection des mineurs et pour se prémunir des risques de création détournée de casinos en ligne.

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