Courtier en crédits immobiliers : facturation de frais avant l’obtention du prêt, MeilleurTaux dans le viseur de UFC-Que Choisir
Certains courtiers ont recours à la facturation de leurs frais de courtages avant l’obtention du crédit immobilier, cela permet notamment de faire baisser le TAEG du crédit et ainsi de passer sous le seuil de l’usure. Une pratique légale, mais évidemment contestable car contraire à l’esprit même de l’existence du seuil de l’usure.
mercredi 30 août 2023, par Denis Lapalus
Le seuil de l’usure est une protection, pas une punition !
Emprunter quand financièrement ses revenus ne permettent pas de le faire en totale sérénité, c’est juste se préparer à des années de galères financières. Le seuil de l’usure a été instauré dans cette optique. Il ne s’agit de punir mais de prévenir. Du reste, la baisse actuelle des prix de l’immobilier devrait montrer à certains qu’emprunter sur 25 ans peut conduire à des situations financières largement perdantes, sans pour autant emprunteur à taux variable. Le capital restant du du crédit pouvant devenir supérieur au prix de vente de marché du bien immobilier.
Ces courtiers avec des astuces à bien davantage que deux balles...
Des courtiers en crédit, dont certains font partie du réseau MeilleurTaux, facturent des sommes élevées à leurs clients sans les avoir correctement informés, comme le prévoit la loi, indique l’association de consommateurs UFC-Que Choisir sur son site internet (en libre accès). Le retournement du marché de l’immobilier, avec l’envolée des taux d’intérêts et l’explosion de la bulle immobilière, ont fait chuter le volume d’affaires des courtiers en crédits immobiliers. Plus qu’agacés par ces seuils de l’usure, après avoir effectué un lobbying historique auprès de la Banque de France afin de faire mensualiser les publications des taux de l’usure, certains courtiers tentent de contourner ces derniers en excluant les frais de dossier. Comment ? Tout simplement en les faisant payer avant l’obtention du crédit. Une démarche qui n’a rien d’illégale, mais qui est totalement contraire à la mise en place de ces seuils, sensés protéger les emprunteurs les plus fragiles financièrement. Dans la pratique, afin d’être en respect avec les lois, ces frais correspondraient, non pas à des frais de courtages, mais à des frais de conseils.
Des frais payés d’avance...
Les frais de courtage en crédit immobilier ne sont dus qu’après le déblocage des fonds ou la signature de l’acte notarié (article L. 519-6 du Code monétaire et financier. ). Depuis quelques mois, des clients se voient présenter des factures entre 1 000 et 3 500 € alors qu’ils n’ont pas encore souscrit de prêt.
Même si aucun crédit immobilier n’est finalement souscrit...
Et c’est là le réel souci. Le courtier encaisse ces frais de mise en relation, sans même garantir l’obtention du crédit immobilier. C’est l’effet double peine. En guise de justification, ces courtiers s’appuient sur la directive européenne 2014/17. Ce texte leur accorde le droit de délivrer, indépendamment de la mise en relation avec un établissement bancaire, un service de conseil. Ils peuvent être rétribués à ce titre ; ce n’est pas illégal. À condition d’annoncer explicitement au consommateur qu’il sera obligé de le régler, même en cas de rejet de son dossier de crédit. Contactée par Que Choisir, la direction de Meilleurtaux affirme que « les deux mandats sont autorisés par la loi. L’avantage pour les clients est que les honoraires du mandat de conseil ne sont pas pris en compte dans le calcul du taux d’usure. Mais peut-être certains professionnels le leur ont-ils mal expliqué ». Typiquement, cette stratégie d’évitement du seuil de l’usure n’est pas un service rendu à ses clients.
Mandat de recherche versus mandat de conseil
Des échanges d’e-mails entre un courtier et un client que nous avons consultés montrent que seule la signature d’un mandat de recherche est évoquée. Jamais celle d’un mandat de conseil. Dans les contrats Meilleurtaux que nous analysons, le mandat de recherche est détaillé sur les cinq premières pages. Y sont mis en avant une « analyse et [une] comparaison des différentes offres disponibles sur le marché […] », ainsi qu’une « présentation des solutions de prêt proposées et leurs caractéristiques ». Ce n’est qu’à la sixième page que l’on tombe sur un document intitulé « Étude en vue de la remise d’une recommandation personnalisée ». Le terme « mandat » n’y figure pas. Difficile donc de comprendre que l’on devra acquitter deux fois un service d’apparence identique, sauf si le courtier le signale clairement. Sans compter que « l’étude » se résume souvent… à un simple récapitulatif des simulations de financement. Sans plus de précision ni aucune indication du coût global du crédit (TAEG), du prix de l’assurance emprunteur et des mensualités assurances comprises. Le comble ? L’« étude » cite parfois des banques qui ne collaborent plus avec le réseau !
Dernier point discutable, le mandat de conseil implique que le courtier soit indépendant. Pourtant, certains font signer deux mandats, bien qu’ils soient commissionnés par une banque. En plus, Meilleurtaux exonère ces honoraires de conseil de TVA alors que la loi ne le permet que pour la recherche de crédit. Si l’administration fiscale risque de pas apprécier, c’est encore le consommateur qui fait les frais de telles pratiques.
MeilleurTaux a répondu que tous les clients concernés par cette facturation de mandat de conseil en dehors de la signature d’un crédit immobilier seront remboursés. Les emprunteurs concernés doivent donc se retourner vers leur intermédiaire MeilleurTaux afin d’obtenir ce remboursement.
Pour en savoir plus, article complet UFC-Que Choisir