Patrimoine des ministres : Le manque de contrôle sur les déclarations effectuées maintient le doute

Les inventaires à la Prévert des déclarations de patrimoine des ministres ne sont en rien un signe de transparence. Seuls des contrôles des patrimoines annoncés devraient permettre de gagner en transparence. La déclaration originale de Mr Cahuzac n’aurait rien révélé, renforçant l’idée que cette publication est une idée impulsive et peu réfléchie.

mardi 16 avril 2013, par Denis Lapalus (avec AFP)

Patrimoine des ministres : la presse regrette une mesure impulsive et attend les contrôles

Les éditorialistes ne sont pas convaincus mardi par l’opération transparence sur le patrimoine des membres du gouvernement, "mesure impulsive, inefficace", et jugent que plus que la transparence, c’est "le contrôle qui fera sens".

"La nécessaire moralisation de la vie publique méritait mieux qu’une mesure impulsive, inefficace, peut être toxique et à coup sûr irréversible", estime Nicolas Demorand dans Libération en doutant que les nouvelles règles permettent "d’éviter une future affaire Cahuzac".

Paul-Henri du Limbert du Figaro fait partie de ceux qui pensent que "Hollande voulait frapper un grand coup et faire oublier l’affaire Cahuzac" et souligne que "les députés PS se chargent eux-mêmes de lui dire que la transparence totale est dangereuse et qu’elle n’est pas pour eux."

Certains comme Jean-Michel Helvig (La République des Pyrénées) attendent la suite : "Il serait plus pertinent de pouvoir évaluer avec rigueur les évolutions de patrimoine en rapport avec les mandats électifs et politiques successifs tout au long d’une carrière. François Hollande a proposé un renforcement des moyens de contrôle pour l’avenir, on verra quel seral’accueil parlementaire à cette proposition".

Nombreux sont ceux qui remarquent que "ce qui apparaît ici comme une transgression forte n’est qu’une banalité dans la quasi totalité des pays européens", tel Daniel Muraz du Courrier Picard. "C’est moins le +dévoilement+ que le contrôle qui fera sens", ajoute-t-il.

"Les membres du gouvernement assujettis à l’ISF vont désormais avoir du mal à donner de la crédibilité à leurs élans socialistes", imagine Philippe Waucampt (Le Républicain Lorrain). Bien qu’il juge l’opération "nécessaire pour des raisons de moralité publique et d’efficacité de gestion".

"Maintenant que tout le monde sait que le gouvernement compte neuf ministres +millionnaires+, l’ambiance sera-t-elle meilleure, et la compréhension plus grande entre le pays et ses dirigeants ?" s’inquiète Bruno Dive de Sud-Ouest. "Peu importe que ces +millions+ aient été acquis honnêtement, qu’ils soient le fruit d’héritages ou d’une longue épargne, qu’aucun ministre ne s’enrichisse dans l’exercice de ses fonctions (ce qui est tout de même l’essentiel), il restera toujours un fond de suspicion envers les gouvernants, surtout s’ilssont de gauche, dans un pays où près de 80% de la population active gagne moins de 1,7 fois le SMIC", ajoute-t-il.

"La transparence est indispensable pour construire la république exemplaire. Mais elle n’implique pas ce pitoyable déballage qui n’aidera pas à expliquer la rigueur aux contribuables ou aux chômeurs", écrit Michel Urvoy dans Ouest-France. "L ’idée d’une instance indépendante, dotée de moyens d’investigation et de sanction, offre plus de garanties d’efficacité et évite ces effets pervers", assure-t-il.

Jacques Camus (La Montagne Centre France) s’amuse de voir que l’exercice "pourrait bien contraindre la gauche à réviser son discours de diabolisation des riches et son rapport schizophrénique à l’argent".

Raymond Couraud de L’Alsace croit que "la révolution de cristal élyséenne pourrait générer des attaques contre les ministres+friqués+". Lui aussi souligne que "si l’on avait appliqué la règle à l’ancien ministre du Budget, son compte en Suisse n’aurait pas figuré sur sa liste patrimoniale, étant par essence illégale."

"François Hollande, en voulant faire du sarkozysme à la va-vite, a commis une erreuren érigeant la richesse comme valeur sale", regrette Yann Marec du Midi Libre.

"La transparence commence maintenant et on saura gré à Hollande d’avoir mis un grand coup de pied dans la boîte à fantasmes" juge Jean-Louis Hervois de La Charente Libre pour lequel ce n’est qu’un début :"Reste à jeter les bases d’une vraie politique de modernisation de la vie publique, mettre un terme au cumul des mandats pour renouveler le personnel politique, lutter contre la corruption, les conflits d’intérêts et le lobbying. Un beau challenge pour une gauche bien empêtrée dans ses mensonges et une belle vacherie pour l’opposition de droite quand l’alternance viendra et qu’il faudra passer l’épreuve."

D’autres enfin veulent en savoir plus tel Hervé Favre de La Voix du Nord : "Quitte à mettre sur la place publique la situation financière de nos ministres, pourquoi en exclure la déclaration de revenus", se demande-t-il.

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