Gestion de la dette : Bonnet d’âne pour la France, désormais intégrée aux pays du Sud, risque systémique pour la zone Euro

La Cour des Comptes ne mâche plus ses mots. La remontée des taux d’intérêts promet des périodes difficiles à la France, dont le déficit a explosé avec la crise sanitaire. Désormais comptabilisée parmi les pays du Sud de l’Europe, les plus largement déficitaires, la France devient un risque pour l’Union Européenne. Le coût de la dette devrait exploser.

mardi 22 février 2022, par Denis Lapalus

De façon surprenante, la gestion de la dette n’est pas un sujet majeur de la campagne présidentielle. Les débats semblent préférer s’orienter autour de sujets récurrents, jamais résolus, depuis de multiples quinquennats : la réforme des retraites, l’évolution de la fiscalité portant sur les successions, et pour le plus anecdotique, la fusion du livret A et du LDDS. Mais sur l’anticipation de la crise financière qui se profile devant la France, aucun discours abouti, tout le monde met la poussière sous la tapis. Et pourtant, le mur est droit devant. La réduction des dépenses de l’Etat ne permettra plus de résorber la dette abyssale, et probablement à peine de rembourser les intérêts, compte-tenu de la remontée des taux d’intérêts. Les candidats à la présidentielle évoquant la réduction des dépenses publiques afin d’amoindrir la dette doivent se préparer à un cuisant échec. Il faudrait augmenter fortement les recettes afin de combler ce gouffre, et cela passe par de mauvaises nouvelles pour les électeurs.

Dette publique française : +560 milliards d’euros depuis 2020

La dette publique est ressortie à 116,3% du produit intérieur brut (PIB) à fin septembre, contre 114,8% à la fin juin, a rapporté l’Insee. L’endettement public de la France, qui s’est fortement creusé depuis début 2020 à cause de la crise sanitaire, avait culminé à la fin du premier trimestre 2021 à 118,1% du PIB. Le gouvernement table sur une dette publique de 115,3% à la fin 2021, et veut ramener l’endettement public à 113,5% en 2022, mais le pays n’en prend pas le chemin, une fois de plus. En valeur absolue, l’endettement de la France représente 2970 milliards d’euros à fin 2021, ce qui signifie un creusement de 560 milliards depuis le début de la crise sanitaire !

Un effort sans précédent ? Vraiment ?

Dans son rapport annuel publié en pleine campagne présidentielle, la Cour des comptes alerte sur la nécessité d’un "effort sans précédent" dans les prochaines années pour maîtriser les dépenses publiques et redresser les comptes de la France, mis à mal par la crise sanitaire. Or, justement, la France n’a jamais été capable d’inverser durablement la tendance du désendettement. Tous les prétextes sont bons pour enfoncer un peu plus le pays dans le rouge vif. Ce n’est pas le fait d’être en déficit qui est un souci. Un Etat n’a pas à afficher une balance positive, bien que ce soit un idéal, mais entre un endettement maitrisable et un

Un endettement à l’américaine ou à la japonaise ?

Pour les partisans de l’endettement à l’infini, tel que pratiqué aux USA ou encore au Japon, il faut juste se rappeler une seule chose : la France fait partie d’une équipe, et si joueur quitte l’équipe, tout le monde perd.

La France rejoint l’Italie et la Grèce

Le quoi qu’il en coûte n’est pas à appliquer pour un pays dont les emprunts ne sont pas recouvrables. L’Etat dépense trop, mais surtout dépense l’argent qu’il ne peut récupérer par ailleurs, car il ne possède pas les recettes suffisantes en face. C’est d’ailleurs bien la conclusion de la Cour des comptes, sous forme d’un avertissement en creux adressé au gouvernement. Elle s’alarme d’une hausse continue des dépenses, que ce soit pour revaloriser les salaires des enseignants ou des soignants, ainsi que d’une baisse à venir des recettes, notamment celle issue des impôts de production, des mesures décidées par Emmanuel Macron. Et la Cour des comptes semble douter de la sincérité des projections budgétaires du gouvernement jusqu’en 2027. Pour parvenir à contenir la dette autour de 115% du PIB, sans l’aggraver encore – ce qui est l’objectif affiché – il faudrait en effet 9 milliards d’euros d’économies supplémentaires chaque année, selon elle.

La dette française

La France fait partie des "bonnets d’âne" avec l’Espagne, la Belgique et l’Italie, tacle la Cour des comptes ! C’est-à-dire des pays dont la dette approche, voire dépasse, les 120% du PIB. A l’opposé des "vertueux", Pays-Bas, Allemagne, Autriche, dont la dette reste inférieure à 80%.

Risque systémique pour la zone euro

D’où un vrai risque de décrochage supplémentaire pour la France, notamment par rapport à l’Allemagne, si elle ne revient pas à davantage de rigueur budgétaire lors du prochain quinquennat. La Cour des comptes évoque même, sinon, un possible déséquilibre au sein de la zone euro, susceptible de menacer sa cohésion.

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