Fonds H2O : L’AMF confirme une sanction de 93 millions d’euros d’amende au total, dont 75 millions pour violation des règles destinées à protéger l’intérêt des investisseurs

La séance publique de la Commission des Sanctions de l’Autorité des Marchés Financiers (AMF) s’est tenue le vendredi 25 novembre 2022. Sa décision a été confirmée le 3 janvier 2023.

lundi 28 novembre 2022, par Denis Lapalus

Fonds H2O, l’AMF en vient aux sanctions

Plus de deux ans après le gel de plusieurs fonds de H2O, le collège de l’Autorité des marchés financiers (AMF) a requis 75 millions d’euros d’amende à l’encontre de H2O pour violation des règles destinées à protéger l’intérêt des investisseurs. Pour la première fois de son histoire, le collège du gendarme de la Bourse a requis la sanction maximale contre un dirigeant : Bruno Crastes, patron de H2O, risque 15 millions d’euros d’amende, ainsi qu’une interdiction d’occuper des fonctions de dirigeant et gérant de fonds en France et dans l’Union européenne pendant dix ans. Une amende de 3 millions d’euros a enfin été demandée pour le directeur des investissements toujours en poste, Vincent Chailley. Au total, les propositions de sanctions s’élèvent à 93 millions d’euros. Il s’agit du montant le plus élevé jamais requis par l’AMF contre une société.

Précisions de H2O AM

H2O AM a décidé en avril 2015 de diversifier sept de ses fonds adossés à des stratégies liquides (sur les obligations, les devises et sur les actions selon les fonds), au travers d’une exposition limitée à de la dette privée de sociétés essentiellement européennes, principalement liées au groupe Tennor et intervenant sur des secteurs diversifiés. En novembre 2019, l’AMF avait ouvert une procédure et a questionné le respect des règles d’investissement dans le cadre de ces opérations. En août 2020, compte-tenu des incertitudes de valorisation de certains titres, sept des fonds français de H2O AM ont été temporairement suspendus le temps de créer une structure de cantonnement (side-pocket). En novembre 2021, le Collège de l’AMF a notifié des griefs à H2O AM.

Conformément à la procédure, un rapporteur a été désigné parmi ses membres par la Commission des Sanctions de l’AMF, pour instruire le dossier et rédiger un rapport. Personnage clé de la procédure de sanction, ce rapporteur est désigné par le président qui s’assure qu’il ne risque pas de se trouver en conflit d’intérêts vis-à-vis des personnes et des sociétés faisant l’objet de la procédure. Présent lors de la séance, le rapporteur n’assiste pas au délibéré car il ne prend pas part à la décision.

Dans ce cadre, la Commission s’est réunie vendredi afin d’entendre le rapporteur, l’avis du Collège de l’AMF (à l’instar d’un procureur) et celui d’H2O AM. Les griefs adressés à H2O AM, qui ont été vigoureusement contestés, à l’exception du troisième, portent notamment sur les points suivants :

  1. non respect des règles d’investissement dans le cadre des opérations sur les titres Tennor ;
  2. non respect des règles d’investissement dans le cadre des opérations de buy and sell back ayant pour sous-jacents les titres Tennor ;
  3. dépassement d’un ratio d’investissement.

A cette occasion, le Collège de l’AMF, dans son rôle de procureur, a requis les sanctions disciplinaires et financières suivantes :
 €75 millions d’amende et un blâme pour la société H2O AM
 €15 millions d’amende et une interdiction pendant 10 ans pour Bruno Crastes d’exercice de l’activité de la gestion individuelle et collective et de diriger une société de gestion en Union Européenne
 €3 millions d’amende et un blâme pour Vincent Chailley

La rapporteure désignée dans cette procédure considère quant à elle, à la fois dans son rapport et durant la séance publique de vendredi, que les manquements reprochés ne sont pas imputables aux deux dirigeants, Bruno Crastes et Vincent Chailley.

Contestations de H2O AM

H2O AM et ses dirigeants ont fermement et factuellement contesté les deux premiers griefs du dossier, qui sont essentiellement techniques. Ils regrettent la sévérité des sanctions requises par le Collège de l’AMF, injustes et disproportionnées au regard du dossier et des conclusions du rapporteur. Il est important de souligner l’absence de toute fraude ou erreur intentionnelle de H2O AM, Bruno Crastes et Vincent Chailley, aussi bien dans la notification de griefs que dans le rapport du rapporteur. Au vu de ces éléments et sans préjuger des conclusions de la Commission des Sanctions de l’AMF, indépendante du Collège, H2O AM attend donc la décision de celle-ci qui devrait être rendue dans les semaines à venir.

H2O AM a, par précaution, constitué une réserve couvrant le montant maximum prévu dans ce type de procédure. Une telle sanction financière n’aurait donc aucun impact sur la conduite des activités de H2O AM.

En conclusion, H2O AM tient à rappeler que : 1. La décision de la Commission des Sanctions devrait être rendue dans les semaines à venir. 2. Les griefs portent sur des faits antérieurs à février 2020. Par conséquent, ceux-ci ne concernent pas les fonds FCP actuels agréés par l’AMF en octobre 2020 qui poursuivent leur progression. 3. La notification des griefs ainsi que le rapport du rapporteur ne font état d’aucune fraude ou erreur intentionnelle de H2O AM et de ses dirigeants. 4. La rapporteure considère que les manquements reprochés ne sont pas imputables aux deux dirigeants, Bruno Crastes et Vincent Chailley. 5. H2O AM s’est déjà engagé à ne plus investir dans des titres privés. 6. Cette procédure n’a aucun lien avec la liquidation des side-pockets, et n’affecte en rien notre engagement total au remboursement de celles-ci le plus rapidement possible et dans le meilleur intérêt des porteurs. 7. H2O AM a, par précaution, constitué une réserve couvrant le montant maximum prévu dans ce type de procédure. Une telle sanction financière n’aurait donc aucun impact sur la conduite des activités de H2O AM.

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