Fraude fiscale : seulement 0,36% des sommes détournées récupérées par le Fisc ?
La fraude fiscale la plus importante en France concerne la TVA. Pas moins de 15 milliards d’euros seraient ainsi détournés selon la Cour de Comptes. Le verrou de Bercy publie de son côté un bilan de seulement 55 millions d’euros récupérés. Le Fisc ne mettrait la main que sur 0,36% des sommes détournées ? Non, les services fiscaux sont plus bien efficaces. Ne confondons pas tout.
lundi 13 septembre 2021, par Denis Lapalus
Cet article fait suite à la publication de sujets dans la presse laissant à penser que les services fiscaux étaient peu efficace, face à l’ampleur de la fraude fiscale en France. Une confusion basée sur la publication du résultat du "Verrou de Bercy", une entité qui était dédiée aux fraudes fiscales caractérisées, principalement effectuées par des entreprises (fraude à la TVA essentiellement, de fait, le profil type de chef d’entreprise fraudeur fiscal est un non-sens complet [1]).
Le verrou de Bercy déverrouillé
C’est évidemment une erreur, puisque si le Verrou de Bercy fait état de 421 dossiers traités en 2020, pour 55 millions d’euros recouvrés, les 365.200 contrôles fiscaux effectués en 2020 ont permis, eux, d’encaisser pas moins de 7,79 milliards d’euros. Le jour et la nuit. Les services fiscaux sont donc bien plus efficaces que certains médias le laissent entendre. Simple confusion entre la fraude fiscale avérée, conduite devant les tribunaux, et la fraude fiscale, involontaire ou pas, qui se termine le plus souvent par un redressement fiscal acceptée par le contribuable. Par ailleurs, à la suite de la promulgation de loi n° 2018-898 du 23 octobre 2018, désormais le Verrou de Bercy n’est plus le seul moyen d’action afin de lutter contre les fraudeurs fiscaux avérés. Les sociétés visées par des redressements d’un montant supérieur à 100.000 euros et assortis de pénalités lourdes (40 % ou plus) voient en effet leurs dossiers automatiquement transmis à la justice, le procureur pouvant alors engager des poursuites pénales.
Le verrou de Bercy, une goutte d’eau dans un océan de recouvrements
En 2020, le verrou de Bercy s’est penché sur 421 dossiers de fraude fiscale. La commission des infractions fiscales ne représente bien peu par rapport aux sommes récupérés par le Fisc. Mais il s’agit là, dans plus de la majorité des cas, des fraudes qui se termineront devant les tribunaux. Cette cellule ne traite que certains dossiers de fraudes fiscales avérées. La montant ainsi récupéré semble dérisoire, soit 55 millions d’euros en 2020 (0,36% des sommes détournées).
Redressements fiscaux, l’essentiel de la lutte contre la fraude
Puisque une somme de petites rivières peut largement dépasser un fleuve, les redressements fiscaux, de leur côté, au nombre de seulement 365.200, semblent bien plus efficaces à la vue du montant récupéré. Les opérations de contrôle et les procédures de recours après contrôle ont été suspendues du mois de mars à la fin du mois de juin 2020. Elles ont repris, très progressivement, à compter de juillet puis septembre 2020. Un total de 365 200 contrôles ont été menés en 2020 malgré le contexte sanitaire (-17% par rapport à 2019) [2]. Le montant des sommes mises en recouvrement a ainsi diminué de 30 %, pour atteindre 8,2 milliards d’euros. En raison de la difficulté à organiser des contrôles directement au sein des entreprises, la priorité a été donnée aux contrôles sur pièces. Le nombre de ceux-ci n’a diminué que de 5 % par rapport à 2019. Sur l‘ensemble de l‘année 2020, les encaissements à la suite du contrôle fiscal atteignent 7,79 milliards d’euros. Cela représente un niveau proche de ceux de l’année 2018 (7,73 milliards d’euros). Le recouvrement des sommes dues après contrôle s’est amélioré avec un taux brut de recouvrement passant de 51 % à 59 %.
Le maintien de l’activité juridictionnelle
L’activité juridictionnelle s’est également maintenue malgré la situation sanitaire. En effet, 1 484 dossiers d’escroquerie ou de fraude fiscale démontrée ou présumée ont conduit à une saisine de l’autorité judiciaire. Le nombre de procédures dites de « police fiscale », consistant en des présomptions caractérisées de fraude, s’est maintenu au niveau de 2019.