Arnaque à l’assurance-vie après un décès : les proches appâtés avec un prétendu contrat bénéficiaire
Les escrocs les plus redoutables n’ont peur de rien. La justice met en garde les familles dont un proche vient de décéder. Un escroc pourrait leur fait miroiter un contrat d’assurance-vie ouvert à l’étranger, il faudrait ouvrir un compte pour pouvoir toucher le pactole... Sauf que...
vendredi 6 février 2015, par Denis Lapalus (avec AFP)
"Nous avons une centaine de victimes, dont 70 qui ont versé des fonds", a expliqué à l’AFP le vice-procureur chargé du dossier à la juridiction interrégionale spécialisée (JIRS) de Nancy, Mathieu Fohlen. Estimant que d’autres victimes pourraient se signaler, la JIRS a décidé de lancer un appel à témoins dans cette affaire.
Déjà 1,2 million d’euros de préjudice et 70 victimes. La justice met en garde jeudi contre une vaste arnaque à l’assurance-vie, après l’ouverture d’une enquête au cours de l’été 2014. Les escrocs contactent les proches d’un défunt, après s’être renseigné sur sa personnalité et celle de ce proche. "Les victimes sont contactées par téléphone par une personne se présentant comme avocat spécialisé dans le droit des successions. L’escroc annonce à son interlocuteur qu’il est bénéficiaire d’une assurance-vie souscrite à l’étranger par le défunt, d’un montant de l’ordre de 200.000 à 300.000 euros", écrit la Juridiction interrégionale spécialisée (Jirs) de Nancy dans un communiqué de presse.
Un système bien rodé
Selon les enquêteurs, le système de cette bande organisée est très solide. Le faux avocat peut s’appeler Marc de la Villardiaire, Charles de la Roche ou Gérald de Courcheville, parle un excellent français et dispose d’un site internet. Il demande à sa victime différentes pièces d’identité, puis d’ouvrir un compte bancaire dans un pays limitrophe de la France. Le présumé bénéficiaire doit ensuite effectuer des virements, présentés comme des cotisations, sur d’autres comptes à l’étranger pour des montants qui sont allés de 6.000 à 100.000 euros selon les cas.
Les personnes âgées principalement ciblées
"Les escrocs s’attaquent à des personnes d’un certain âge, et principalement dans les zones frontalières : le but, c’est que leurs victimes ouvrent un compte à l’étranger, où elles versent les +frais+, et sur lequel l’héritage doit tomber", a encore expliqué le vice-procureur, qui compare le mode opératoire à celui des escroqueries aux faux ordres de virement qui se multiplient dans les entreprises.
100 000 euros soutirés à certaines victimes
"On leur explique ensuite que, malheureusement, le défunt avait oublié de régler une dernière mensualité de 6.000 euros. Puis, s’ils ont mordu le hameçon, qu’il faut encore 6.000 euros de frais de rapatriement, etc...", a détaillé le vice-procureur.
Les faux avocats font par ailleurs signer à leurs victimes une "clause de confidentialité", qui leur interdit de parler de la transaction, "une manière de tenir leurs victimes qui expriment ensuite une grande culpabilité, puisqu’elles ont sciemment spolié les autres héritiers, leurs frères ou leurs sœurs", a précisé M. Fohlen.
Certaines victimes ont dépensé jusqu’à 100.000 euros, sans jamais toucher le moindre centime du supposé compte à l’étranger.
Déposer une plainte
"La victime est d’autant plus vulnérable qu’elle hésite à évoquer la situation avec ses proches ou à dénoncer les faits à la justice. Vous fraudez le fisc français et vous lésez vos frères et soeurs qui pourraient prétendre à l’héritage", explique un magistrat cité par Reuters. La Jirs de Nancy précise que les "personnes victimes de ces faits sont invitées à déposer plainte auprès de la brigade de gendarmerie ou commissariat de police de leur domicile".