Top 3 des idées reçues sur le Livret A : financement des logements sociaux, coût pour les banques, placement anti-inflation

Les idées reçues sur le livret A sont nombreuses. Le livret A couterait cher aux banques ? Ces dernières souhaiteraient s’en séparer. Le livret A servirait essentiellement au financement des logements sociaux ? Le livret A serait un placement permettant de préserver son capital contre l’inflation... Bien, et dans la vraie vie ?

mercredi 15 décembre 2021, par Denis Lapalus

 Livret A, 3 idées reçues

Le livret A , dont le taux va augmenter au 1er février 2022, est le livret épargne le plus détenu par les Français. Pas mois de 55 millions de livret A sont ouverts, selon les chiffres de la CDC (Caisse des Dépôts et Consignations). Mais le livret A n’est pas le placement épargne préféré des Français, puisque l’Assurance-Vie est très loin devant, en termes d’encours. Si le le couple Livret A/LDDS totalise 469 milliards d’encours, l’assurance-vie compte de son côté pas moins de 1.861 milliards d’euros, soit près de 4 fois plus (3.96 fois, chiffres d’octobre 2021). Les deux types de produits épargne n’ont du reste rien de comparable, le livret A permet de placer son épargne de précaution, au cas où, alors que l’assurance-vie est un produit d’épargne de long terme. Toujours est-il que le livret A est entouré de clichés, de vérités d’hier, aujourd’hui fausses, selon lesquelles, il permettrait de juguler l’inflation, ou encore il couterait cher aux banque, ou enfin, que son rôle premier serait de contribuer au financement les logements sociaux. Des affirmations, qui ont été vraies par le passé, mais qui ne le sont plus depuis quelques années déjà.

 1 - Parade à l’inflation ?

Le livret A ne protège plus le capital placé de l’inflation. Et pourtant, la formule officielle du calcul du taux du livret A tient compte de la moyenne semestrielle de l’inflation. Comment est-ce donc possible ? Tout simplement car l’évolution de l’inflation ne compte que pour moitié dans la détermination du taux du livret A. L’autre moitié étant constituée par des taux d’intérêts de marché (Taux ESTER), qui sont encore fortement négatifs. La somme des deux donne donc le futur taux du livret A, en-dessous du niveau de l’inflation. Le livret A ne protège donc pas le capital de l’inflation. La preuve en est, que depuis cette année 2021, le taux de rendement réel (net d’inflation du livret A) est largement négatif sur 2021.

 2 - Coût élevé pour les banques

Il est fréquent de lire que le livret A coûte cher aux banques. La confusion porte sur le fait que ce sont effectivement les banques qui créditent les comptes client, tels qu’ils apparaissent sur les relevés. Mais ces intérêts versés sont en majorité (à hauteur de 60%) payés par la CDC (Caisse des Dépôts et Consignations, l’Etat donc). Les banques ne rémunèrent que 40% des encours du livret A/LDDS. La prochaine hausse du taux du livret A coûterait près de 400 millions d’euros supplémentaires aux banques, compte-tenu de l’encours actuel. Si ce montant est effectivement proche de la réalité, ce qui est moins vrai est le terme de coût. Le livret A ne coûte pas aux banques, il rapporte. La hausse du livret A peut venir amputer une partie de leurs bénéfices, c’est tout. En général, quand le taux du livret A augmente, les taux des crédits octroyés augmentent également. Et donc, dans la même proportion, les bénéfices des banques. En effet, sur les 40% des encours du livret A/LDDS que détiennent les banques, ces dernières les exploitent à leurs profits. Les banques ne perdent pas d’argent avec le livret A, elles en gagnent. Non seulement, elle ne rémunèrent que 40% des encours (cf Livret A : où va mon argent ?), mais elles sont rétribuées par la CDC pour la gestion des livrets A des épargnants (à hauteur de 0.30%), et enfin, l’activité la plus lucrative pour une banque sont ces crédits accordés aux PME. Rappel : une banque prête jusqu’à 12 fois le même euro... Donc même à un taux de 2% de crédit, imaginez la rentabilité, près de 15 milliards d’euros pour l’ensemble des banques. Le doublement du taux du livret A couterait aux banques un total d’intérêts de moins de 2 milliards d’euros. Comparés aux 15 milliards de revenus... Il reste de la marge ! Toutefois, il est vrai que les banques gagneraient davantage en faisant placer l’argent déposé sur les livrets A sur un livret épargne maison, puisque ce serait alors 100% des fonds exploités par les banques.

Livret A / LDDS : montant total des intérêts

Montant total des intérêts du livret A / LDDS sur une année
Livrets épargneTotal des encours en Milliards d’euros (M€)Montant des intérêts en millions d’euros (m€) / Taux du livret A
2.00%
2.50%
3.00%
3.50%
Livret A
428.50 M€
8 570 m€
10 713 m€
12 855 m€
14 998 m€
LDDS
155.60 M€
3 112 m€
3 890 m€
4 668 m€
5 446 m€
TOTAL
584.2 M€
11 684 m€
10 713 m€
17 526 m€
20 447 m€
Établissements financiersEncours en Milliards d’euros (M€)Intérêts à payer en millions d’euros (m€) / Taux du livret A
BANQUES
233.68 M€
4 674 m€
5 842 m€
7 010 m€
8 179 m€
CDC
350.52 M€
7 010 m€
8 763 m€
10 516 m€
12 268 m€
(source : Encours Caisse des Dépôts et Consignations, Calculs FranceTransactions.com)

Livret A / LDDS : qui paie les intérêts ?

Le livret A souffre de nombreuses idées reçues. L’une d’elle étant que le livret A couterait cher aux banques. En fait, seul 40% des encours du Livret A/LDDS sont rémunérés par les banques, et ces dernières sont commissionnées à hauteur de 0.3% sur les encours. Par ailleurs, avec les encours, les banques financent essentiellement des PME, une activité hautement lucrative pour les banques. Les banques ne perdent donc aucunement de l’argent avec le livret A. Bien au contraire... D’où, du reste, sa longévité.

 3 - Financement des logements sociaux ?

Là encore, ce qui était vrai par le passé ne l’est plus désormais. Contrairement à une idée reçue persistante, le livret A ne sert pas en priorité au financement des logements sociaux, loin de là, même dans la totalité. Moins de 35% des encours du livret A sont affectés à cette mission. Au final, c’est bien le financement des PME qui est bien le premier objectif des encours du livret A/LDDS. Ainsi, le financement des logements sociaux n’arrive qu’en second plan. Les épargnants peuvent ainsi faire valoir que leur épargne finance l’économie réelle, même si ce sont bien les banques qui en bénéficient en premier lieu.

Encours du livret A/LDDS, le financement des PME avant tout
Financement des PMEFinancement des logements sociaux
CDC - Prêts PME 4.98 % CDC - Logements sociaux
34.41 %
Banques - Prêts PME 32.40 % - -
TOTAUX
37.38%
-
34.41%

Par ailleurs, il peut être constaté que l’argument du maintien en l’état du livret A pour le financement des logements sociaux est totalement fallacieux. Une autre organisation pouvant être mise en place. Du reste, nombre de pays européens financent leurs logements sociaux sans détenir de livret A. Les dispositifs similaires du livret A ont été supprimés dans la majorité des pays européens après la seconde guerre mondiale. Seule la France reste attachée à son livret A.

 Livret A en chiffres

Livret A : solde moyen par livret A, encours total

Solde moyen des livrets A

Données chiffrées actualisées à fin août 2024 (source CDC)
Livret A
Solde moyen Livret A
7.790,91 €
Encours total Livret A
428.50 Milliards d’€

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