Ces influenceurs dans la tourmente : multiplication des plaintes, NFT, trading, copy trading, cagnottes, conseils financiers hasardeux, la justice entre en piste
Nombre d’influenceurs sont désormais la cible de plaintes, accusés de tromper leur audience sur leurs intentions. Distiller des conseils financiers en France est une activité réglementée.
mardi 26 mars 2024, par Denis Lapalus
JLC Family, Billionaire Dogs, Billio Elite, Bel Niya...
Le vent tourne pour les influenceurs. Non seulement la législation les contraint à afficher désormais systématiquement leurs partenariats, mais la justice s’intéresse de plus près à de nombreuses arnaques et autres incitations à investir sur des actifs à risques de perte en capital. Cette activité étant strictement réglementée en France.
Le Collectif AVI
Au mois de janvier 2023, pour la première fois en France, des victimes, accompagnées d’une association et d’un cabinet d’avocats, ont initié des démarches afin de confronter des "influvoleurs" aux conséquences juridiques de leurs actes. À la suite du dépôt de ces plaintes, le parquet de Paris a ouvert plusieurs enquêtes. Le collectif AVI, encouragé par ces premiers résultats, poursuit son engagement et accompagne de nouveaux plaignants dans cinq affaires liées à des influenceurs. Bien que des avancées législatives aient été réalisées avec l’adoption d’une loi sur les influenceurs et la mise en place du DSA (Digital Services Act), il est urgent d’agir sur le plan juridique pour contrer les pratiques abusives persistantes de certains acteurs du secteur.
La "star" d’un docu-réalité du groupe TF1 ciblée
La "star" d’un docu-réalité du groupe TF1 ciblée. Les premières plaintes portent sur :
- La collection de NFT "Billionaire Dogs"
- Le trading associé au "Billio Gang", "Billio Elite" et "Billio 1%"
De nombreux éléments et documents devraient conduire à des enquêtes pour des accusations d’escroquerie en bande organisée, abus de confiance en bande organisée et association de malfaiteurs impliquant les divers intervenants de ces projets. Parmi eux figure Laurent Correia, alias Laurent Billionaire, participant à son propre programme de télé-réalité "JLC Family" centré sur sa famille et diffusé sur TFX.
Une cagnotte partagée par l’influenceuse anciennement numéro un sur Snapchat
D’autres plaintes concernent la cagnotte de l’association "Bel Niya" destinée à "Atlas Kinder" au Maroc. Une collecte de fonds a été initiée en octobre 2021 sur la plateforme Cotizup et promue sur les réseaux sociaux par les influenceuses Kenza Benchrif (connue sous le nom de “Poupette Kenza“), Soukaïna El Mizeb et Anissa El Mizeb. La cagnotte était gérée par l’association caritative française "Bel Niya", qui s’était engagée à la reverser intégralement au profit d’un orphelinat marocain créé par une association liée à la fondation suisse "Atlas Kinder". Or, à ce jour, près de 70 000 euros recueillis n’ont pas été versés à la cause convenue et des doutes importants pèsent sur la destination de ces dons. Une démarche judiciaire a été engagée à la suite d’informations documentées et de réclamations répétées de donateurs se sentant floués. Des plaintes contre X seront déposées pour abus de confiance en bande organisée. Les autorités compétentes seront chargées de déterminer les responsabilités des différents acteurs impliqués dans cette affaire.
Des recours collectifs touchant l’influence et le commerce en ligne
Produits jamais livrés, articles défectueux ou non conformes à leur publicité, ingrédients dans la composition interdits en France, stratagèmes publicitaires douteux, non-respect des normes sanitaires : de nombreuses victimes ont sollicité l’assistance du Collectif AVI pour dénoncer ce qu’elles considèrent comme des arnaques. Pour ces différents litiges impliquant des produits vendus en ligne et promus par des influenceurs, le collectif a rassemblé de nombreux témoignages et preuves. Les plaignants, souhaitant faire valoir leurs droits, ont été réunis pour engager des actions juridiques communes, notamment pour des accusations telles que l’escroquerie en bande organisée, l’abus de confiance en bande organisée, ainsi que toute autre infraction pouvant être établie par l’enquête. Ces nouvelles initiatives viennent compléter les trois cas mentionnés précédemment.
Plaintes à venir
Les plaintes à venir s’inscrivent dans des affaires qui ont affecté des centaines de victimes ayant contacté le collectif, dont les préjudices se chiffrent en centaines de milliers d’euros. Au-delà de celles qui lui ont transmis des éléments, le nombre de victimes de ces affaires se compte en milliers et les préjudices en millions. "En initiant les premières poursuites judiciaires collectives, le Collectif AVI a permis à de nombreuses victimes de s’exprimer et a soutenu de nouvelles actions. Celles qu’il accompagne aujourd’hui donneront enfin aux plaignants la possibilité de faire valoir leurs droits."
Rassemblement de dossiers et appel à une sécurisation renforcée
L’association s’investit actuellement dans la gestion de plusieurs autres cas. Il invite les éventuelles victimes d’influence à se joindre aux recours collectifs en préparation en s’inscrivant et en déposant un dossier sur le site internet www.collectifavi.com. Parallèlement, l’association se concentre sur le renforcement de ses actions dans divers domaines. Elle intensifie ses efforts pour promouvoir et sensibiliser aux bonnes pratiques, tout en appelant vivement le secteur à dénoncer les pratiques néfastes. Elle pointe la passivité des médias sociaux et exhorte vivement les autorités à prendre des mesures décisives contre le non-respect de la réglementation sur la publicité et les droits des consommateurs, ainsi que de la loi "Delaporte Vojetta" par les influenceurs et les agences d’influence. De même, elle appelle à des sanctions pour les infractions aux directives du DSA commises par les plateformes.
Au-delà des fraudes, sa mission de sécurisation de l’espace en ligne aborde des enjeux plus larges tels que la diffusion de contenus pornographiques auprès des mineurs, la cyber malveillance et la protection des enfants influenceurs. Dans ce contexte, le Collectif AVI aspire à obtenir le statut spécial de signaleur de confiance, ce qui simplifierait, accélérerait et rendrait plus efficace le traitement de ses signalements par les plateformes et les autorités compétentes.
À propos du Collectif AVI
Le Collectif AVI s’est engagé dans une mission cruciale : venir en aide aux victimes des dérives des influenceurs et sensibiliser le public pour prévenir de nouveaux cas. Parmi les abus, on trouve la promotion de drop shipping abusif, de placements financiers risqués, de contrefaçons, de fraudes au CPF, d’actes médicaux illicites et de produits dangereux. Il organise régulièrement des sessions d’information, notamment des "Spaces" sur X, les dimanches et mercredis de 21h30 à minuit. L’histoire du collectif débute en juin 2022, lorsque des individus anonymes et indignés se réunissent autour du hashtag "blatarnaque" sur X. Sous le nom initial de Collectif AVMN, le groupe dénonce les méfaits d’un couple d’influenceurs basés à Dubaï, Marc et Nadé Blata.
Deux mois plus tard, le collectif se structure et se constitue en association collégiale régie par la loi 1901, adoptant le nom de Collectif AVI (Collectif d’Aide aux Victimes d’Influenceurs). Son champ d’action s’étend pour inclure tous les consommateurs et utilisateurs des médias sociaux affectés par certaines pratiques délétères de l’influence, souvent menées par des personnalités issues de la télé- réalité. Les actions du Collectif AVI ont attiré l’attention des législateurs, lui permettant de jouer un rôle dans l’élaboration de la première loi sur l’influence commerciale promulguée le 9 juin 2023. L’association a également collaboré avec les autorités et a contribué à la fermeture de plusieurs comptes problématiques sur les réseaux sociaux. Sa renommée s’est étendue à travers de nombreux médias en France et à l’étranger.