Placements pour se protéger de l’inflation : les 4 erreurs les plus fréquentes
La forte remontée de l’inflation fait resurgir sur la toile nombre de fadaises à propos de placements sensés protéger le capital des épargnants contre l’inflation. Liste de ces placements anti-inflation subissant, comme les autres, l’inflation de plein fouet.
Le fonds en euros EURO+ proposé par Swiss Life a publié une performance annualisée de + 4.10 % en 2023, sans bonus de rendement ni autre artifice marketing. Accessible via le contrat d’assurance-vie monosupport Placement-direct EURO+. Sans frais sur les versements, seulement 0.60% de frais de gestion, ce contrat EURO+ peut être considéré comme étant un des meilleurs plans épargne sans risque. Le portefeuille obligataire du fonds EURO+ affichait un rendement actuariel de 5.56% à fin 2023 !.
Si, sur l’ensemble des placements de taux d’intérêts à taux fixe (livrets épargne, compte à terme, etc.), le consensus est largement partagé par tous, l’inflation vient réduire le rendement et le capital, sur d’autres supports d’investissements, les idées sont déjà largement plus discutées. La richesse étant dans la différence. Il appartient à chacun de se forger sa propre opinion. À chacun sa vérité. Voici la mienne. Tout le monde semble désormais d’accord pour acter que le livret A ne protège plus de l’inflation (le rendement réel du livret A est de 1,68% en Décembre 2024 !). Certains effectueront des calculs plus complexes afin de moyenner le taux de l’inflation sur une durée de quelques années, mais franchement... L’essentiel est acté.
Placements anti-inflation : croire est aussi ignorer
En revanche, parmi les placements les plus souvent cités comme étant des placements préservant de l’érosion de l’inflation, nous retrouvons les fonds en euros, l’immobilier, l’or et plus généralement les métaux précieux et matières premières, mais également les actions des valeurs bancaires. Tour d’horizon de ces idées reçues.
Fonds en euros
Les fonds en euros seraient des armes anti-inflation ? Étonnant que de pouvoir lire cette information, les fonds en euros seraient des placements permettant de préserver le capital des épargnants contre l’érosion inflationniste. Je pourrais citer quelques médias à grande audience, mais loin de m’exposer à des critiques acerbes en retour, je préfère affirmer simplement que cela est faux. Je pense savoir d’où vient la confusion. Les fonds en euros sont investis sur des portefeuilles obligataires de long terme, principalement non indexés sur l’inflation (cf les OATi ne protègent pas totalement de l’inflation puisque ce sont seulement les coupons de ces obligations qui sont indexés sur l’inflation, mais passons ce détail). Les fonds euros subissent donc l’inflation en pleine poire. Aussi bien sur le capital que sur le rendement du portefeuille. Les obligations sont portées jusqu’à leurs échéances, sans quoi le capital ne pourrait être garanti.
L’erreur de jugement porterait sur le fait qu’il est généralement admis qu’une hausse de l’inflation se traduit par une remontée des taux d’intérêt, et que donc, les nouvelles souscriptions d’obligations seraient effectuées sur une base de rémunération plus élevée. Première remarque. La situation que nous vivons actuellement montre que cette idée reçue est fausse. L’inflation remonte fortement, les taux d’intérêt bien faiblement. Ce qui s’est produit par le passé ne se reproduit pas systématiquement (rappelez-vous de cette petite ritournelle... Les performances passées ne préjugent....). La corrélation actuelle entre inflation et taux d’intérêt est donc faible. Deuxième remarque. L’inertie d’un fonds euros est telle, qu’avant qu’une remontée des taux d’intérêt ne fasse redresser le rendement global du portefeuille... Vous aurez sans doute effectué le rachat de votre contrat. Non, les fonds euros permettent de bénéficier de la variation à la hausse des taux d’intérêts, mais avec un énorme effet retard, et ne sont pas des placements particulièrement efficace contre une remontée de l’inflation.
Le seul argument en faveur des fonds euros serait que certains admettent une partie de leur capital sur des fonds actions, en contrepartie d’une réduction de la garantie en capital (cas de ces fonds euros nouvelle génération, ne garantissant plus 100% du capital). Ils seraient alors que partiellement impacté par l’inflation. Allez, concédons ce point.
Pour les épargnants pensant le contraire, il suffit de scruter les rendements publiés et l’inflation historique. Si vous constatez une corrélation entre les deux graphiques, bravo, vous avez une super vue.
L’immobilier ?
Fichtre, l’immobilier aurait une vertu anti-inflationniste selon certains. Mince alors. Mais comment cela est-ce possible ? Comment expliquer que le prix de l’immobilier augmenterait au minimum systématiquement davantage que l’inflation ? En fait, l’immobilier n’a pas davantage de pouvoir anti-inflationniste que d’acheter n’importe quel bien tangible, dont le prix augmenterait avec l’inflation. Là encore le biais est un constat sur le passé. Souvent, les prix de l’immobilier augmentent, lorsque nous sommes en présence de phase inflationniste. Est-ce pour autant que l’immobilier protège de l’inflation ? Il suffit de scruter la dernière crise immobilière dans les années 1990. L’inflation était proche des 2% en moyenne, avant la convergence à l’euro, et pourtant cela n’a pas empêché les prix de l’immobilier de baisser. Les prix auraient-ils baissé davantage si l’immobilier n’avait pas de réel pouvoir anti-inflationniste ? Nous pouvons en douter.
Et l’immobilier locatif alors ? L’argument avancé alors est que les loyers sont indexés sur l’inflation, via l’indice IRL (Indice de Revalorisation des Loyers). Dans ce cas, effectivement, l’on peut considérer que les loyers sont protégés de l’inflation, sous réserve évidemment que le propriétaire puisse appliquer les hausses correspondantes (ie, c’est prévu dans le bail de location). Par ailleurs, je vous invite à prendre connaissance de la procédure à suivre afin de répliquer la hausse de loyer, vous verrez que cela n’est pas si simple et que l’IRL ne réplique pas totalement l’inflation, mais c’est effectivement mieux que rien. Donc les loyers sont protégés de l’inflation dans ce cas, mais pas votre capital immobilier. Sa valeur n’augmente pas forcément de l’inflation.
L’on prête aisément toutes les facultés à l’or. Adulé des Français, ils en détiennent le plus gros stock physique par habitant au monde. Mais l’OR ne sert aucun rendement, et son prix varie en fonction des marchés. L’OR n’a absolument aucune vertu spécifique contre l’inflation. Pas plus que l’argent, le cuivre, ou le zinc. Il suffit de scruter les cours historique de l’or vs inflation pour s’en apercevoir. Il n’existe aucun facteur de corrélation, positif ou négatif. Quel que soit la devise de cotation du métal jaune. Non, cette croyance provient uniquement du fait que, dans l’hypothèse où le système financier dans son ensemble, venait à sombrer, l’OR pourrait redevenir une monnaie, comme autrefois. Bref, miser sur l’OR afin de se protéger de l’inflation, c’est miser sur un scénario catastrophe, dont la probabilité qu’il ne se produise, compte-tenu de la puissance actuelles des banques centrales, est proche du zéro absolu.
Il est rappelé que l’OR est également une matière première. C’est d’ailleurs son principal usage. Conducteur électrique de premier choix, le prix de l’or varie essentiellement en fonction des besoins industriels, et ses variations de cours en cas de crise, ne sont que des artéfacts de spéculateurs. La légende, datant des années 1970, étant que l’OR serait une valeur refuge. Bien évidemment, depuis les accords de Bretton-Woods, l’or n’est plus une monnaie étalon, et n’est donc plus une valeur refuge depuis plus d’une cinquantaine d’années... Mes les idées reçues sont tenaces.
Investir en actions, sur des valeurs bancaires ?
Là c’est sans doute le pompon. Les valeurs bancaires seraient des investissements à réaliser en présence d’inflation. Pourquoi ? Pensant qu’inflation rime avec remontée des taux d’intérêts, les banques pourraient alors vendre de l’argent plus cher, augmenter leurs marges, etc. Bref, encore un léger délire. C’est oublier que la marge des banques est constituée par la différence entre les taux d’achat de vente de l’argent. Pour rappel, l’argent ne leur coûte rien actuellement, au contraire, elles doivent en vendre au maximum pour ne pas être pénalisées. Ce serait même sur le papier, l’effet contraire qui se produirait. Les emprunteurs remboursant un capital qui a perdu de sa valeur. Si les emprunteurs se disent gagnant en empruntant lors des phases de poussées de l’inflation, les banques seraient donc perdantes sur ce point. Tout le monde ne peut pas "gagner". Par ailleurs, les taux d’intérêt bas ne font pas fondre les bénéfices des banques, il suffit de les consulter pour s’en convaincre. Non, décidemment, cette idée reçue ne tient pas non plus la route.
Mais alors ?
Mais alors, c’est bien de tout repousser ainsi, mais quels placements permettent alors de lutter contre l’inflation ? Pour de vrai ? Et bien si peu. Les seuls les plus approchants permettent de sécuriser les rendements, comme les OATi (obligations indexés sur l’inflation). Mais ces OATi sont peu accessibles aux particuliers. Il existe alors des fonds obligataires indexés sur l’inflation. Sinon, les loyers tirés des locations immobilières, revalorisés chaque année permettent de lutter contre l’inflation, mais c’est tout ! Ne vous en déplaise, si vous souhaitez une remontée des taux d’intérêts pour vos placements, pensez que si l’inflation progresse en même temps, vous n’y gagnerez rien de plus.
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