Immobilier neuf : une crise majeure arrive, faillites redoutées
Dans une tribune publiée dans Les Echos, Jacques Chanut, président de la met en garde le gouvernement contre une crise majeure dans l’immobilier neuf. La prochaine loi de finances 2020 mettant à mal les dispositifs de soutien à l’immobilier, à l’instar du PTZ, des APL, ou encore du Pinel dont les zones d’éligibilité seraient une nouvelle fois revue.
mercredi 6 novembre 2019, par Jacques Chanut
Immobilier neuf : les indicateurs sont mauvais, au fil des mois
Les mises en chantier sont en baisse de 3,65 % sur douze mois et les permis de construire reculent de 5,9 %. La politique du gouvernement prépare une crise majeure du logement pour demain, accompagnée de son concert de faillites, estime ainsi Jacques Chanut.
Mois après mois, les mauvais chiffres de la construction annoncent une crise quasi certaine pour le secteur. Sur douze mois (d’octobre 2018 à septembre 2019), par rapport aux douze mois précédents, les mises en chantier ressortent en baisse de 15.100 unités (-3,5 %) ; pis, en ce qui concerne l’avenir, les permis s’affichent en baisse de 27.600 unités (-5,9 %). On nous annonçait le choc de l’offre et les chiffres révèlent une hémorragie…
Alors, bien sûr, certains évoquent les prix qui montent, les municipales qui génèrent de l’attentisme. Pourtant, ces mêmes paramètres touchent aussi le non-résidentiel, où pourtant l’on relève des progressions, parfois même à deux chiffres.
D’autres vont jusqu’à soutenir l’absence de besoins, justifiée par la progression du nombre de logements vacants. La réalité s’avère tout autre. La rénovation des logements devenus obsolètes dans les villes moyennes ne permettra jamais de répondre à la pression démographique dans les métropoles et autres zones dynamiques. L’aspiration des Français à accéder à la propriété d’une maison individuelle ne sera pas plus endiguée par le seul discours sur la lutte contre l’artificialisation des sols. L’immobilier présente un cycle de réponse lent, ce que feignent d’ignorer les politiques publiques sous la pression du court-termisme. En l’état, c’est à se demander si la situation du logement ne sera pas pire en 2022 qu’elle ne l’était en 2014, pire année du XXIe siècle pour la construction neuve !
On nous annonçait le choc de l’offre et les chiffres révèlent une hémorragie…
La véritable cause du retournement se trouve dans la volonté de Bercy de réduire par tous les moyens le coût des aides au logement, faussement présentées comme inflationnistes et inefficaces, donc inutiles. Faute de baisse des dépenses de fonctionnement de l’Etat et des prélèvements obligatoires, Bercy joue aux apprentis sorciers en sabrant les dépenses d’investissement porteuses d’avenir pour l’attractivité des territoires. Tandis que la réforme des APL laisse perplexes les observateurs quant à notre capacité durable à produire du logement abordable, le secteur privé est budgétairement frappé de plein fouet : la chronique annoncée d’une suppression du PTZ, d’abord en B2 et C, puis plus largement, la réduction à portion congrue du dispositif Pinel représentent à l’évidence la raison du retournement actuel du marché de la construction.
C’est à se demander si la situation du logement ne sera pas pire en 2022 qu’elle ne l’était en 2014, pire année du siècle
Une telle politique de gribouille se paye, dans notre secteur, au prix fort. Alors que l’immobilier a besoin de stabilité, on tâtonne et multiplie les injonctions contradictoires : oui pour une politique du logement ambitieuse, mais on concentre les sapes budgétaires sur le logement ; oui, pour une politique d’équilibre des territoires, mais haro sur le soutien à la maison individuelle… Par conséquent, malgré un marché du crédit historiquement favorable, couve désormais une crise de l’immobilier et des territoires qui frappera assurément les plus fragiles.
Cette politique prépare une crise majeure du logement pour demain, accompagnée de son concert de faillites, de pertes d’emplois et de territoires qui se videront toujours plus.
On pourrait s’y résigner, en faisant l’hypothèse que la crise se soldera par un énième plan de relance, comme dans l’ancien monde. Pour notre part, nous voulons éviter que le pire ne soit systématiquement au rendez-vous. C’est pourquoi, depuis des mois, nous nous épuisons à alerter pour prévenir le crash.
Le logement est indissociablement lié au bien-être des Français et à l’attractivité des territoires. Ce diagnostic est largement partagé par les parlementaires. Espérons que le bon sens finira par l’emporter à l’occasion du vote de la loi de finances pour 2020.