ORPEA : la CDC va prendre le contrôle du groupe mondial d’Ephad, forte dilution des actionnaires
C’est officiel, la CDC va bien finir par prendre le contrôle du groupe ORPEA.
mardi 31 janvier 2023, par Denis Lapalus
ORPEA : négociation en bonne voie
La Caisse des dépôts et consignations (CDC) va prendre le contrôle du groupe mondial d’Ephad, qui compte 350 maisons de retraite en France. Un accord a été trouvé avec une partie des créanciers du gestionnaire de maisons de retraite qui a demandé lundi la suspension de la cotation de ses actions et de l’ensemble de ses titres obligataires. Ce deal valoriserait Orpea 1,15 milliard d’euros et la Caisse des dépôts en deviendrait l’actionnaire majoritaire avec 50,2 % du capital. Les créanciers ont accepté de « tirer un trait sur 70 % de 3,5 milliards d’euros de dette », rapporte également le journal.
Prix théorique par action de 17 euros avant dilution
Si l’on divise la valorisation de 1,15 milliard pour les quelques 64 693 851 actions ORPEA, le cours, purement théorique devrait se situer autour des 17 euros. L’action ORPEA cotait encore 7.12€ lundi dernier avant la suspension de sa cotation.
Mais avec l’augmentation de capital annoncée, la dilution envisagée sera massive pour les actionnaires. Ces derniers verront, si le plan de sauvetage annoncé ce matin est mis en place, leur part au capital passer de 100% à 0,4%.
La Caisse des Dépôts expliquait agir au nom de l’intérêt général. « Nous n’intervenons pas pour conduire une opération financière, mais faire en sorte qu’Orpea change ses pratiques sur la base de paramètres financiers à même de tirer vers le haut tout le secteur », avait souligné un porte-parole de l’institution.
Communiqué du groupe ORPEA
ORPEA SA (la « Société ») constate, sur la base du relevé de conclusions des discussions entre les parties établi par la conciliatrice dans le cadre de la procédure de conciliation, qu’un accord de principe[1] sur un plan de restructuration financière (l’« Accord de Principe ») a été trouvé entre la Société et, d’une part, un groupement d’investisseurs français de long terme mené par la Caisse des Dépôts et Consignations, accompagnée de CNP Assurances, et comprenant par ailleurs la MAIF, accompagnée par MACSF (ensemble le « Groupement »), et d’autre part, les cinq principales institutions (le « SteerCo ») coordonnant un groupe élargi de créanciers financiers non sécurisés d’ORPEA SA détenant environ 50% de la dette non-sécurisée de la Société dont le montant s’élève à près de 3,8 milliards d’euros (les « Créanciers Financiers Non Sécurisés Soutenant l’Accord de Principe »). A cette occasion, les parties prenantes ont affirmé leur soutien au management et au Plan de Refondation du Groupe, tel que présenté par la Société dans son communiqué du 15 novembre 2022.
La documentation contractuelle (et notamment le termsheet et l’accord de lock-up) formalisant l’Accord de Principe est en cours de finalisation entre les parties.
Comme indiqué par la Société dans ses précédentes communications, la mise en œuvre de la restructuration financière envisagée entrainera une dilution massive pour les actionnaires existants.
Ainsi, à l’issue des opérations envisagées dans l’Accord de Principe et détaillées ci-après, les actionnaires existants, s’ils décident de ne pas participer aux augmentations de capital qui leur seront ouvertes, ne détiendraient qu’environ 0,4% du capital de la Société, tandis que le Groupement détiendrait environ 50,2% du capital de la Société et les Créanciers Financiers Non Sécurisés environ 49,4% du capital de la Société.
L’Accord de Principe répond aux objectifs d’ORPEA d’atteindre une structure financière soutenable et de financer son Plan de Refondation présenté le 15 novembre 2022, à travers :
i.La conversion en capital de l’intégralité des dettes financières non sécurisées portées par ORPEA SA, correspondant à une diminution de l’endettement brut du Groupe d’environ 3,8 milliards d’euros,
ii.L’apport de fonds propres en numéraire (new money equity) à hauteur de 1,55 milliard d’euros, via des augmentations de capital qui seraient souscrites par le Groupement à hauteur globalement de 1 355 millions d’euros, et garanties pour le solde à hauteur de 195 millions d’euros par le SteerCo.
Ces opérations devant permettre de garantir l’équilibre financier futur du Groupe, avec une réduction de près de 60% de son endettement net sur une base pro forma au 31 décembre 2022, et à terme une réduction très significative de son ratio de levier[2], inférieur à 6,5x à horizon fin 2025[3].
Commentant cet accord de principe, le Président du Conseil d’administration, Guillaume Pepy, déclare : « Au nom du Conseil d’administration, je salue le travail remarquable effectué par Laurent Guillot et les équipes d’ORPEA pour aboutir à un accord de principe. L’arrivée au capital de l’entreprise du Groupement des investisseurs français mené par la Caisse des dépôts et consignations est un gage de confiance dans notre métier et nos professionnels. L’accord trouvé assure la pérennité d’ORPEA et permet à l’entreprise de mettre en œuvre son Plan de Refondation ORPEA CHANGE !, au service de la première mission du Groupe : prendre soin des plus fragiles. ».
Le Directeur général Laurent Guillot ajoute : « L’accord de principe que nous avons trouvé dans le cadre de la procédure de conciliation menée sous l’égide de la conciliatrice, Maître Hélène Bourbouloux, va permettre de restructurer très significativement le bilan de l’entreprise à travers une réduction de près de 60% de son endettement net, un renforcement très important de ses fonds propres, et un ratio de levier ramené à moins de 6,5x à horizon 2025. Ainsi, cet accord nous apporte les moyens financiers nécessaires pour mener à bien notre Plan de Refondation ORPEA CHANGE ! présenté le 15 novembre dernier. Ce Plan vise à mettre en place un modèle d’entreprise éthique, vertueux, et de qualité répondant aux grands enjeux de l’accompagnement de toutes les fragilités et notamment de la dépendance. La confiance et l’engagement aux côtés d’ORPEA du Groupement d’investisseurs composé de la Caisse des dépôts et consignations, de CNP Assurances, de MAIF et de MACSF, ainsi que d’une proportion très importante des créanciers du Groupe, soutiendra le déploiement rapide de notre transformation suivant nos grandes priorités : faire progresser sans cesse la qualité des soins et de l’accompagnement de nos résidents, de nos patients et de leurs familles ; garantir la sécurité et améliorer les conditions de travail de nos collaborateurs ; mettre en œuvre les principes éthiques et de transparence attachés à notre mission ».
La Société va désormais finaliser la documentation (termsheet et accords de lock-up notamment) nécessaire à la mise en œuvre de l’Accord de Principe (voir notamment le paragraphe 3 ci-dessous) avec le Groupement et les Créanciers Financiers Non Sécurisés Soutenant l’Accord de Principe. Elle projette de présenter, dans le délai de la procédure de conciliation en cours, une requête afin de solliciter l’ouverture d’une procédure de sauvegarde accélérée destinée à permettre la mise en œuvre de l’Accord de Principe.
1. Principaux points de l’Accord de Principe
Les parties prenantes ont convergé sur les principaux points suivants dans le cadre de l’Accord de Principe :
a) Une première augmentation de capital de la Société avec maintien du droit préférentiel de souscription des actionnaires existants, à hauteur d’environ 3,8 milliards d’euros, garantie par l’ensemble des créanciers financiers non sécurisés d’ORPEA SA qui souscrivent le cas échéant par voie de compensation avec leurs créances existantes ; tout produit en espèces résultant de la souscription par les actionnaires existants à cette augmentation de capital sera intégralement utilisé pour rembourser les créanciers financiers non sécurisés de la Société à la valeur nominale à due proportion (l’« Augmentation de Capital avec Maintien du DPS par Conversion de l’Endettement Non Sécurisé ») ;
b) Une deuxième augmentation de capital de la Société en numéraire avec suppression du droit préférentiel de souscription des actionnaires[4] devant permettre au Groupement d’y souscrire à hauteur d’environ 1,16 milliards d’euros (new money equity) (l’« Augmentation de Capital Groupement New Money ») et de détenir environ 50,2% du capital et des droits de vote de la Société (sur une base entièrement diluée) ;
c) Une troisième augmentation de capital de la Société en numéraire avec maintien du droit préférentiel de souscription des actionnaires existants[5], d’un montant d’environ 0,4 milliard d’euros (l’« Augmentation de Capital avec Maintien du DPS New Money »), à laquelle les membres du Groupement, devenus actionnaires au terme de l’Augmentation de Capital Groupement New Money, s’engagent, en contrepartie de l’attribution des BSA, à souscrire à titre irréductible à hauteur d’environ 0,2 milliard d’euros en exerçant leurs droits préférentiels de souscription ; par ailleurs, les membres du SteerCo, en contrepartie de l’attribution des BSA, garantiraient le solde de l’Augmentation de Capital avec Maintien du DPS New Money en souscrivant en numéraire, jusqu’à 195 millions d’euros, à la partie non souscrite sur exercice des droits préférentiels de souscription[6].
Après réalisation des opérations prévues dans l’Accord de Principe, et sur la base de la valorisation des capitaux propres de la Société retenue par les parties pour les besoins de ces opérations, les créanciers financiers non sécurisés qui soutiendraient l’Accord de Principe, pourraient recouvrer environ 30% du montant nominal de leurs créances (en incluant une rémunération de leur soutien exprimé avant l’ouverture du plan de sauvegarde d’un montant de 30 points de base de la valeur nominale de leur créance), converties en capital dans le cadre de l’Augmentation de Capital avec Maintien du DPS par Conversion de l’Endettement Non Sécurisé.
2. Actionnariat et gouvernance
Actionnariat
A la suite de la réalisation de l’Augmentation de Capital avec Maintien du DPS par Conversion de l’Endettement Non Sécurisé (et partant de l’hypothèse qu’aucun actionnaire existant ne souscrirait à cette première augmentation de capital), de l’Augmentation de Capital Groupement New Money, de l’Augmentation de Capital avec Maintien du DPS New Money et en cas d’exercice des BSA par leurs titulaires, l’ensemble des créanciers financiers non sécurisés et le Groupement deviendront les principaux actionnaires de la Société.
Selon les principes arrêtés dans l’Accord de Principe et les valorisations retenues par les parties, et si :
(i) Aucun actionnaire existant ne souscrivait à l’Augmentation de Capital avec Maintien du DPS par Conversion de l’Endettement Non Sécurisé, et
(ii) Seuls les Créanciers Financiers Non Sécurisés Soutenant l’Accord de Principe et le Groupement souscrivent à l’Augmentation de Capital avec Maintien du DPS New Money au titre de leurs engagements de garantie respectifs[7],
les pourcentages de détention seraient les suivants :
- | Actionnaires actuels | Groupement | Créanciers financiers non sécurisés |
Après réalisation de l’Augmentation de Capital avec Maintien du DPS par Conversion de l’Endettement Non Sécurisé (sur une base totalement diluée) | 1,0% | - | 99,0% |
Après réalisation de l’Augmentation de Capital avec Maintien du DPS par Conversion de l’Endettement Non Sécurisé, l’Augmentation de Capital Groupement New Money, l’Augmentation de Capital avec Maintien du DPS New Money et l’exercice des BSA (sur une base totalement diluée) | 0,4% | 50,2% | 49,4% |
A titre illustratif, l’incidence de l’Augmentation de Capital avec Maintien du DPS par Conversion de l’Endettement Non Sécurisé, de l’Augmentation de Capital Groupement New Money, de l’Augmentation de Capital avec Maintien du DPS New Money, et de l’émission des BSA sur la participation d’un actionnaire détenant 1% du capital de la Société préalablement à toutes ces opérations serait la suivante :
- | Quote part du capital (en %) | |
- | Pas d’exercice de ses DPS par l’actionnaire | Exercice de la totalité de ses DPS par l’actionnaire au titre de l’Augmentation de Capital avec Maintien du DPS par Conversion de l’Endettement Non Sécurisé et de l’Augmentation de Capital avec Maintien du DPS New Money |
AVANT réalisation de l’Augmentation de Capital avec Maintien du DPS par Conversion de l’Endettement Non Sécurisé, de l’Augmentation de Capital Groupement New Money, de l’Augmentation de Capital avec Maintien du DPS New Money et de l’émission des BSA | 1,000% | 1,000% |
APRES réalisation de l’Augmentation de Capital avec Maintien du DPS par Conversion de l’Endettement Non Sécurisé, de l’Augmentation de Capital Groupement New Money, de l’Augmentation de Capital avec Maintien du DPS New Money et de l’émission des BSA | 0,004% | 0,491% |
Compte tenu de la dilution devant résulter des augmentations de capital, le conseil d’administration procèdera, sur une base volontaire en application de l’article 261- 3 du Règlement général de l’AMF, à la nomination d’un expert indépendant aux fins de se prononcer sur la restructuration financière. L’expert indépendant évaluera les conditions financières de la restructuration financière pour les actionnaires et délivrera un rapport contenant une attestation d’équité qui sera mis à la disposition des actionnaires.
Il est précisé que les membres du Groupement entendent agir de concert. Les membres du SteerCo ont déclaré qu’ils n’entendent pour leur part pas agir de concert et n’agiront pas de concert vis-à-vis de la Société à la date de réalisation des opérations.
Le Groupement s’engagera, en vertu de l’Accord de Principe, à ne pas déposer d’offre publique visant les titres d’Orpea au cours des 5 années suivant la date de réalisation de la transaction.
Gouvernance
Les principes de composition du Conseil d’administration à l’issue des opérations arrêtés dans l’Accord de Principe sont les suivants :
· Dissociation des fonctions de Président du Conseil d’administration et de Directeur général
· Conseil d’administration à 13 membres, comprenant :
· Un poste de censeur pour le premier actionnaire (parmi les membres du SteerCo devenus actionnaires) après le Groupement.
3. Conditions suspensives et mise en œuvre
La mise en œuvre de l’Accord de Principe reste soumise à la réalisation de plusieurs conditions suspensives et notamment à : (i) La finalisation de la documentation contractuelle requise et notamment une termsheet et un accord de lock-up, (ii) L’ouverture d’une procédure de sauvegarde accélérée par le Tribunal de Commerce de Nanterre, (iii) La rédaction et la conclusion d’un accord avec les créanciers bancaires sécurisés de la Société au titre des Tranches A, B et C pour ajuster la documentation contractuelle existante, ainsi que l’obtention de nouveaux financements, (iv) L’approbation par l’Autorité des marchés financiers des prospectus relatifs aux augmentations de capital envisagées, (v) L’obtention par le Groupement d’une dérogation définitive à l’obligation de déposer une offre publique sur les actions ORPEA en conséquence de la restructuration financière, (vi) L’obtention des autorisations réglementaires nécessaires, le cas échéant, et (vii) L’approbation du plan de sauvegarde par le Tribunal de Commerce de Nanterre.