Donation d’un bien avec réserve d’usufruit
Donner un bien immobilier à un enfant, tout en réduisant les droits de donations, est devenu courant, via la donation patrimoniale. Il s’agit d’un simple don avec réserve d’usufruit. Les droits de donations se calculent sur la base de la valeur en nue-propriété et selon l’âge du donateur.
samedi 31 août 2019, par Denis Lapalus
Donner une partie de son patrimoine de son vivant est un acte pertinent, au niveau patrimonial. Plutôt que de donner l’intégralité des droits sur tout ou partie de son patrimoine, donner un bien avec réserve d’usufruit est devenu courant. Un démembrement de la propriété du bien est effectué. D’un côté, le donateur conserve l’usufruit du bien : il peut ainsi continuer à l’utiliser et en percevoir les revenus (si existants). Il s’engage également à entretenir le bien. De l’autre, l’usufruitier, donc le donataire, celui qui reçoit le bien devient nu-propriétaire. Il sera pleinement propriétaire du bien lors du décès du donataire, sans avoir un euro à payer, puisque tous les droits auront été déjà réglés lors du démembrement. Mais attention tout de même. Si cette donation est effectuée moins de 15 ans avant le décès du donateur, le montant de la donation sera déduit de l’abattement disponible lors de la succession pour ce bénéficiaire.
Que se passe-t-il si le nu-propriétaire décède en premier ?
C’est la question la plus fréquente. C’est simple dans le cas où l’usufruitier décède en premier, la pleine propriété revient au nu-propriétaire. La logique voudrait que ce soit ainsi, mais parfois la vie en décide autrement. Dans le cas du pré-décès du nu-propriétaire, les droits de nue-propriété sont inclus dans sa succession. Ses héritiers vont donc percevoir ces droits, après abattements, droits à payer, etc. Ce qui peut complexifier rapidement les choses...
Nue-propriété : attention aux contraintes
Il est fréquent que ce que bon plan fiscal se transforme rapidement en galère financière, avec de nombreuses brouilles dans les familles. En cause, ces clauses de démembrement, mises en place, trop rapidement, sans grande connaissance. La règle est de ne pas transmettre un bien immobilier ancien qui n’est pas en excellent état. Pourquoi ? Les nus-propriétaires sont concernés financièrement par tous les travaux de gros œuvres du bien (toiture, fenêtres, murs, etc.). Les travaux de maintien en l’état du bien les plus coûteuses. Ainsi, partant sur des durées de démembrement de plusieurs dizaines d’années, la réfection d’une toiture peut devenir rapidement un cauchemar. Le nu-propriétaire devant engager des frais financiers pour lesquels il n’a aucun retour, puisqu’il ne "profite" pas du bien. Le plus souvent, les travaux ne sont ainsi pas effectués, et le bien se dégrade. Au final, le bien transmis a une valeur bien inférieure à celle estimée lors de la mise en place du démembrement. Le bon plan fiscal du départ s’est donc transformé en fiasco, avec en plus, le plus souvent, des brouilles dans la famille.
Une donation fiscalement avantageuse
C’est tout l’intérêt de ce type d’opération, réduire drastiquement les droits de donation. Le gouvernement a indiqué en 2019 vouloir réduire sensiblement la taxation sur les donations afin d’éviter cet engouement pour les démembrements. Les offices notariales ne désemplissent pas pour ces montages, qui, comme indiqué plus haut, sont sources de nombreuses querelles dans les familles.
Clés de répartition en démembrement
Retrouvez tous les détails concernant les calculs issus de l’application des clés de répartition entre nu-propriétaire et usufruitier en fonction de l’âge de l’usufruitier.
Age de l’usufruitier | Valeur usufruit | Valeur nue-propriété |
---|---|---|
moins de 21 ans | 90% |
10% |
de 21 à 30 ans | 80% |
20% |
de 31à 40 ans | 70% |
30% |
de 41 à 50 ans | 60% |
40% |
de 51 à 60 ans | 50% |
50% |
de 61 à 70 ans | 40% |
60% |
de 71 à 80 ans | 30% |
70% |
de 81 à 90 ans | 20% |
80% |
à partir de 91 ans | 10% |
90% |
Plus le donateur est jeune, et plus la valeur de la nue-propriété cédée est faible. Le démembrement de parts de SCPI fait actuellement l’objet d’un fort engouement. Des exemples de calcul sont fournis.
Pour la liquidation des droits d’enregistrement et de la taxe de publicité foncière, la valeur de la nue-propriété et de l’usufruit est déterminée par une quotité de la valeur de la propriété entière, conformément au barème ci-après (source article 669 CGI) :
Le don patrimonial avec réserve d’usufruit présume que la valeur du patrimoine transmis ne baisse pas. Certains biens immobiliers ne prennent pas de valeur, mais peuvent en perdre (cas notamment des résidences secondaires ou des biens en mauvais état). Le don patrimonial avec réserve d’usufruit est donc à utiliser avec parcimonie, la réduction fiscale ne doit pas être l’unique objectif, surtout que pour les biens de faible valeur, après application des abattements, la différence financière entre une donation en démembrement, ou via une succession peut être faible.