Hausse de taux du Livret A : qui paie les intérêts du livret A ?

À fin octobre 2024, le montant total des dépôts, livret A et LDDS confondus, était de 581.8 milliards d’euros. Au taux de 3%, cela représente pas moins de 12 804 millions d’euros d’intérêt à payer.

lundi 23 janvier 2023, par FranceTransactions.com

Le livret A est la première niche fiscale de France. Le montant des intérêts du livret A à verser est impressionnant, qui va payer ?

 Livret A, un livret à part

Le livret A n’a rien d’un livret épargne classique. Le Livret A serait plutôt un emprunt d’Etat perpétuel, à taux variable. C’est essentiellement l’Etat qui paie les intérêts du livret A, et non principalement les banques, comme beaucoup le pensent encore. La théorie voudrait que ce soit le cas, mais dans la pratique, il en est tout autre. Les banques versent les intérêts sur les livret A de leurs clients, mais cet argent provient à 60% des poches de l’État, et quelque part donc, de la vôtre.

 Qui paie quoi ?

Du fait de la centralisation des dépôts (60% auprès de la CDC), les banques ne paient que 40% des intérêts des livret A/LDDS. Les intérêts portant sur les encours détenus dans leurs livres. Les banques sont rémunérées à hauteur de 0.3% par la CDC pour la tenue de compte des livret A auprès de leurs clients. Enfin, les banques exploitent ces 40% d’encours restant dans leurs comptes, via notamment l’octroi de crédits auprès des PME. Une activité lucrative qui chasse une des idées reçues que le livret A coûterait cher aux banques.

Livret A / LDDS : montant total des intérêts

Montant total des intérêts du livret A / LDDS sur une année
Livrets épargneTotal des encours en Milliards d’euros (M€)Montant des intérêts en millions d’euros (m€) / Taux du livret A
2.00%
2.50%
3.00%
3.50%
Livret A
426.80 M€
8 536 m€
10 670 m€
12 804 m€
14 938 m€
LDDS
155.00 M€
3 100 m€
3 875 m€
4 650 m€
5 425 m€
TOTAL
581.8 M€
11 636 m€
10 670 m€
17 454 m€
20 363 m€
Établissements financiersEncours en Milliards d’euros (M€)Intérêts à payer en millions d’euros (m€) / Taux du livret A
BANQUES
232.72 M€
4 654 m€
5 818 m€
6 982 m€
8 145 m€
CDC
349.08 M€
6 982 m€
8 727 m€
10 472 m€
12 218 m€
(source : Encours Caisse des Dépôts et Consignations, Calculs FranceTransactions.com)

Livret A / LDDS : qui paie les intérêts ?

Le livret A souffre de nombreuses idées reçues. L’une d’elle étant que le livret A couterait cher aux banques. En fait, seul 40% des encours du Livret A/LDDS sont rémunérés par les banques, et ces dernières sont commissionnées à hauteur de 0.3% sur les encours. Par ailleurs, avec les encours, les banques financent essentiellement des PME, une activité hautement lucrative pour les banques. Les banques ne perdent donc aucunement de l’argent avec le livret A. Bien au contraire... D’où, du reste, sa longévité.

 Des origines du livret A

Mis en place en 1818 par Louis XVIII pour renflouer les caisses vides de l’Etat, après les déboires militaires de Napoléon, le livret A n’est autre qu’un emprunt auprès des Français.

L’argent, collecté par les banques, sert avant tout à l’Etat. Ce dernier l’utilise à plusieurs fins :

  • pour financer en partie le logement social (145 milliards d’euros),
  • pour financer des collectivités locales sur le long terme,
  • pour permettre aux banques de financer leurs clients entreprises (40% des dépôts restant auprès des banques),
  • à défaut, pour spéculer sur les marchés financiers. Le livret épargne sans risque mise donc sur les marchés financiers. Les encours étant très largement supérieurs aux besoins de financement des logements sociaux. Pas moins de 18% des fonds déposés sur le livret A sont investis sur des sociétés cotées. 30% des fonds collectés sont investies dans les PME.

Livret A/LDDS : montant total des dépôts à fin octobre 2024, solde moyen par livret

Livret A, toutes les statistiques © FranceTransactions.com/stock.adobe.com

 Les banques sont rémunérées par l’Etat

Les banques perçoivent une rémunération de l’Etat de 0.30% sur les encours collectés depuis 2016 (0.40% auparavant), et 60% de ces fonds sont centralisés à la CDC. Les banques peuvent conserver dans leur bilan en moyenne entre 40% à 50% (avec un maximum 65% pour une banque) des sommes collectées sur le livret A. Le solde étant centralisé à la CDC, en vue de servir au financement du logement social. Le taux des encours centralisés par les banques étant de seulement 40% en 2021 selon la CDC.

 Niche fiscale : L’État assume

Première niche fiscale de France, le livret A n’a rien d’une épargne pour les plus modestes. Ces derniers, non imposables sur les revenus n’ont aucun avantage à utiliser ce placement. Pour eux, les livrets épargne fiscalisés sont plus avantageux. Dans la pratique, près de 10% des livrets A sont au plafond des versements, soit 22950€, confirmant ainsi que les épargnants les plus imposés sont les premiers utilisateurs de cette niche fiscale. Le manque à gagner pour l’Etat est estimé entre 300 et 400 millions d’euros par an, uniquement pour ce volet fiscal.

 Plus de 7 milliards d’euros d’intérêts à payer sur le livret A/LDDS chaque année

Au global, le premier payeur du livret A, c’est l’Etat, et donc les contribuables. Un financement estimé à près de 17 454,00 millions d'euros d’euros par an, un coût exorbitant pour le financement du logement social. Dans tous les autres pays où ce type de placement avait été mis en place après les grandes guerres, il a été supprimé pour son non-sens financier. La France s’obstine à conserver cette légende de l’épargne, ne correspondant plus vraiment à rien. Mais les Français y sont attachés, alors aucun politique ne prendra la décision de le supprimer.

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