L’immobilier locatif, un investissement anti-inflation ? IRL borné, plafonds de loyers, impayés et gel des hausses pourraient bien vous faire changer d’avis
L’argument massue consistant à avancer que la hausse automatique des loyers selon l’indice IRL permet de se parer de l’inflation, pourrait bien se fendre de tout son long. Un gel de la hausse des loyers pourrait bien être mis en place.
jeudi 19 mai 2022, par Denis Lapalus
Les plus anciens se souviennent de la crise inflationniste subie lors de la crise du pétrole en 1973, mais également celle de la guerre du Golfe en 1990. Le marché de l’immobilier n’avait pas résisté et avait plongé, faisant dire ainsi que l’immobilier n’a rien d’investissement anti-inflation. Avec cette nouvelle phase d’inflation forte en 2022, liée également essentiellement aux prix de l’énergie, il n’en faut pas plus pour se rappeler que rien n’est acquis. L’investissement immobilier n’est pas dénué de risques, que ce soit pour des biens détenus en direct, ou via, par exemple, des supports financiers, tels que les SCPI. La dernière crise majeure des SCPI a marqué les esprits des investisseurs. L’avantage étant désormais qu’une détention en assurance-vie de parts de SCPI permet de supprimer le risque d’illiquidité sur ce type d’investissement. Très appréciable en cas de crise.
L’immobilier locatif : un investissement résilient face à l’inflation ?
De nombreux investisseurs immobiliers en sont persuadés. L’immobilier locatif serait un excellent investissement anti-inflation. Et pourtant, du côté des conseillers en gestion de patrimoine, les avis, le plus souvent, divergent (le rappel des crises immobilières passées reste bien ancré). En effet, l’argument avancé afin d’attester que l’immobilier locatif serait un investissement résistant face à l’inflation, et notamment celle que nous connaissons actuellement, repose sur le fait que les loyers sont le plus souvent indexés sur l’IRL (indice de référence des loyers). Cet indice tient compte en effet de l’inflation, telle que publiée par l’INSEE. Toutefois cet IRL comporte un léger effet retard (calculé sur les 12 derniers mois, par trimestre), et ne tient pas compte de l’évolution des prix, ni du tabac, ni des loyers. Oui donc en théorie, mais en pratique, cela est parfois différent.
Immobilier et résilience face à l’inflation ? Plusieurs bémols...
Les baux sont-ils bien rédigés ? Certes, l’IRL permettrait de répercuter la perte de valeur de l’argent, soit l’inflation. La hausse des prix étant une notion très proche, mais différente. Toutefois, encore faut-il que le bail de location prévoit cette réévaluation annuelle du loyer. Or, de nombreux investisseurs n’auraient pas prévu cette clause dans leurs baux. Et surtout, quand bien même, cette clause de réévaluation du loyer serait en place, il faut que le locataire ait suffisamment de ressources financières afin de pouvoir continuer à payer son loyer ! C’est la limite de la résilience de l’investissement immobilier face à cette inflation.
Le locataire pourra-t-il payer ? C’est la grande question. Si le bailleur revoit à la hausse le loyer de 4% au mois de juillet prochain, le locataire, dont les revenus n’augmentent pas aussi rapidement que l’inflation que nous connaissons actuellement, pourra-t-il faire face ? La hausse des impayés de loyers serait déjà perceptible selon quelques médias.
Le plafond des loyers n’est pas toujours revu en fonction de l’inflation ! Par ailleurs, dans de plus en plus de communes, notamment des grandes villes, comme Paris, Lyon, Lille, Grenoble, etc., les loyers sont d’ores et déjà plafonnés. La réglementation a évolué et le bailleur ne peut pas appliquer la hausse de loyer qu’il souhaite ou que l’IRL lui indique de répliquer. Là encore, l’inflation ne sera donc pas compensée totalement pour le bailleur. Mais le pire reste à venir.
Le gel des loyers, on en parle ou pas ? En Espagne, c’est acté ! Les loyers ne peuvent pas augmenter de plus de 2% en 2022. Or, en France, le prochain IRL devrait avoisiner les 4%. Un possible gel de la hausse des loyers pourrait être appliqué en France. Cela semblerait assez logique, compte-tenu de ces stress économiques. Une mesure qui aurait effectivement du sens tant cette inflation est essentiellement contextuelle (Guerre en Ukraine, crise sanitaire, engorgement des flux de matières premières au niveau mondial). Pour l’investisseur endetté à taux fixe, le risque est fermé. Même si les loyers perçus n’augmentent pas, ses mensualités ne grimpent pas non plus d’un autre côté. En revanche, la baisse des prix de l’immobilier (qui n’est actuellement pas du tout le cas, au contraire !), sera sa future perte financière latente à constater.